Savon de Marseille

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Histoire

En France, le savon est utilisé depuis l'Antiquité. Pline l'Ancien rapporte dans son Histoire naturelle que les gaulois emploient un produit à base de suif et de cendres pour se teindre les cheveux en roux. Le savon leur sert de décolorant pour les cheveux.

Marseille possède des manufactures de savon à partir du XIIe siècle qui utilisent comme matière première l'huile d'olive produite localement. La soude (à l’époque le mot « soude » désignait le carbonate de sodium) se trouve dans les cendres provenant de la combustion d'une plante, la salicorne.

En 1688, l'Édit de Colbert, ministre de Louis XIV, réglemente la fabrication du savon. Les manufactures de savons doivent cesser leur activité l’été car la chaleur nuit à la qualité du savon. Selon l'article III de cet édit : « On ne pourra se servir dans la Fabrique de Savon, avec la barrille, soude ou cendre, d'aucune graisse, beurre ni autres matières ; mais seulement des huiles d'olives pures, et sans mélange de graisse, sous peine de confiscation des marchandises. » Cette réglementation assure la qualité du savon qui fait la renommée des savonneries marseillaises. Dans le même temps, des fabriques de savon s'installent dans la région, à Salon de Provence, Toulon ou Arles.

Au XVIIIe siècle, Marseille passe d'une vingtaine à 48 fabriques de savon en 1786. Après une crise pendant la Révolution Française, l'industrie marseillaise continue à se développer jusqu'à compter 62 savonneries en 1813. La soude est alors obtenue à partir d'eau de mer grâce au procédé inventé par Nicolas Leblanc.

À partir de 1820, de nouvelles matières grasses sont importées et transitent par le port de Marseille. Les huiles de palme, d'arachide, de coco et de sésame sont utilisées pour la fabrication du savon. Les savonneries marseillaises subissent la concurrence des savonneries anglaises ou parisiennes, ces dernières emploient du suif qui donne un savon moins cher.

Au début du XXe siècle, la ville de Marseille possède 90 savonneries. Mais après la Seconde Guerre mondiale, le savon est supplanté par les détergents de synthèse et les savonneries marseillaises ferment les unes après les autres. Il ne reste qu'une poignée de fabricants dans la région.

Fabrication

La saponification

Le savon de Marseille résulte d'une réaction chimique de saponification, transformation chimique au cours de laquelle des corps gras (graisses ou huiles) sont hydrolysés en milieu alcalin par une base, de la soude (NaOH). L'hydrolyse des corps gras produit à du glycérol et un mélange de carboxylates (de sodium ou de potassium) qui constitue le savon.

Réaction de saponification :

CH2(OOC-R) - CH(OOC-R) - CH2(OOC-R) + 3 NaOH --> CH2OH - CHOH - CH2OH + 3 R-CO2-Na

soit : corps gras + NaOH (ou KOH) --> glycérol + savon

où R est une chaîne d'atomes de carbone et d'hydrogène. On peut avoir par exemple R=(CH2)14 - CH3

Le procédé marseillais

Le procédé marseillais est un procédé discontinu de fabrication du savon. Il se compose de plusieurs étapes :

L'empâtage et l’épinage

On introduit en même temps les matières grasses et la soude dans une cuve ou dans un chaudron de grande contenance, et on les mélange tout en les chauffant à 120°C. La saponification démarre. La température élevée sert à accélérer la réaction de saponification. Les graisses et la soude ne sont pas miscibles. Pour faciliter la réaction, on met un fond de savon provenant d'une précédente fabrication qui sert à maintenir une émulsion entre les réactifs (matières grasses et soude). C’est pour la même raison qu’on agite le mélange.
On enlève la glycérine obtenue.

La cuisson

On ajoute de la soude pour avoir une réaction complète des matières grasses. Si une partie des matières grasses ne réagissait pas avec la soude, elle risquerait de rancir et poserait des problèmes de conservation. La pâte est cuite plusieurs heures

Le relargage

La pâte est nettoyée à l’eau salée pendant plusieurs heures pour éliminer la soude en excès. Le savon est très peu soluble dans l’eau salée à la différence de la soude. Il forme un précipité que l’on récupère. Le savon terminé ne contiendra plus du tout de soude.

La liquidation

La pâte est mise au repos. Elle peut être lavée à l’eau.

Le coulage et le séchage

La pâte fluide est versée dans des moules puis mise à sécher pour la durcir.

Le découpage et l’estampillage

Le savon solidifié est découpé en cubes puis marqué.

Utilisation

Le savon de Marseille est d'abord un produit d'hygiène du corps.

C'est un bon nettoyant ménager.

Il sert aussi pour le lavage du linge. On trouve du savon de Marseille en copeaux ou en paillettes pour la lessive. On l’emploie notamment pour laver le linge des personnes allergiques et des bébés parce qu’il ne contient pas d’ingrédients allergisants. On frotte délicatement le linge avec un cube de savon de Marseille végétal ou on utilise des paillettes ou encore un savon que l'on a râpé. On laisse alors tranquillement tremper le linge dans l'eau chaude savonneuse et on n'a pas trop à frotter (sachant que les frottements usent le linge délicat). L'eau doit être un minimum chaude car les paillettes de savon se dissolvent mal à basse température

Le savon de Marseille aujourd'hui

Le terme « savon de Marseille » n’est pas une appellation, il correspond seulement à une méthode de fabrication et à une composition de 72% de matière grasse. Donc les savons de Marseille que l’on trouve sur le marché ne sont pas fabriqués à Marseille (sauf exception) et ne contiennent pas forcément d’huile d’olive.

Le savon artisanal

Un savon de Marseille traditionnel se présente sous la forme d’un gros cube de 600 grammes, sur lequel est gravé « 72% d’huile » et le nom de la savonnerie.

Le savon artisanal à l’huile d’olive est composé d’huile d’olive, d’huile de coprah et d’huile de palme. La couleur du savon à l’huile d’olive est entre le marron et le vert.

On trouve aussi du savon de Marseille blanc, composé d’huile d’arachide, d’huile de coprah et d’huile de palme.

Le savon artisanal ne contient ni parfum ni colorant ni adjuvant de synthèse. Il est donc biodégradable à 100%.

Le savon industriel

Le savon de Marseille vendu en grande surface est un savon de ménage ou de toilette qui contient différentes matières grasses. Les principales matières grasses utilisées sont listées dans le tableau ci-dessous.

matière grasse (huile ou graisse) nom INCI de la matière grasse nom INCI des molécules de savon obtenues acide gras dominant
suif (graisse de bœuf) Tallow Acid Sodium Tallowate acide hexadécanoïque
huile d'arachide Arachis hypogaea Sodium Peanutate acide octadécène-9-oïque
huile d'olive Olea Europea Sodium Olivate acide octadécène-9-oïque
huile de coprah (noix de coco) Cocos Nucifera Sodium cocoate acide dodecanoïque
huile de palme Elaeis guineensis Sodium Palmate adide hexadecanoïque
huile de palmiste Elaeis guineensis Sodium Palm Kernelate Elaeis Guineensis


Le savon de Marseille industriel contient également différents additifs : agents anticalcaire, conservateurs, colorants, parfums ... Ces additifs sont souvent polluants.

Les produits dérivés

Le savon de Marseille a une image positive qui évoque le naturel, la simplicité et la propreté "à l'ancienne". En plus des savons, les industriels proposent donc d'autres produits contenant du savon de Marseille comme des produits nettoyants et des lessives. Ces produits contiennent en général un faible pourcentage de savon et l'odeur du savon de Marseille est obtenue avec du parfum de synthèse. Il est à noter que l'UFC Que Choisir le 26/11/2004 a mis en garde les consommateurs sur des produits multi-usage à base de savon de Marseille, qui polluent l'air intérieur en relarguant des substances chimiques peu recommandables pour la santé. Cette pollution n'est pas due aux savon de Marseille mais aux ingrédients chimiques qui permettent d'obtenir le parfum de savon.

Voir aussi

Article connexe

Savon

Lien externe

Autehtique savon de Marseille depuis 1850 Site de la savonnerie Marius Fabre, fabricant de savon à l'ancienne