Chaux
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Le terme de chaux est générique. Il regroupe un grand nombre de produits, dont le seul point commun est d'être obtenu par calcination (c'est à dire chauffage à haute température) de pierre calcaire. La chaux vive désigne le matériau brut obtenu en sortie de four. La chaux éteinte (chaux aérienne ou chaux hydraulique) est obtenue par extinction de la chaux vive. Selon la composition du matériau de base, on obtiendra de la chaux aérienne ou calcique ( à base de calcaire pur), de la chaux hydraulique ( à base de calcaire argileux ), de la "chaux dolomitique ou magnésienne" ( à base de dolomie ou de calcaire magnésien ).
Histoire[modifier]
La chaux aérienne sert depuis l'antiquité pour réaliser des mortiers pour la construction, des enduits et des badigeons sur les murs. Elle est aussi utilisée pour protéger les arbres fruitiers, ou lutter contre la putréfaction des cadavres en cas d'épidémie mais là on emploie surtout la chaux vive qui détruit les bactéries (en particulier pour les animaux morts du charbon (Bacillus antracis).
Types de chaux[modifier]
La chaux vive[modifier]
La chaux vive est une poudre blanche, composée d'oxyde de calcium CaO. C'est un produit dangereux, principalement employé dans l'industrie et l'agriculture. Mise en contact avec de l'eau, elle produit une grande quantité de chaleur.
La chaux aérienne[modifier]
La chaux aérienne (ou chaux hydratée ou chaux éteinte) est obtenue à partir d'hydratation de chaux vive issue d'un calcaire très pur qui contient très peu d'argile. C'est de l'hydroxyde de calcium Ca(OH)2, le nom usuel est la "Portlandite". Sa prise, lente, s'effectue par carbonatation, c'est à dire en absorbant le gaz carbonique (CO2) présent dans l'atmosphère : d'où son nom de chaux aérienne. On la trouve sous différentes appellations : CAEB, chaux éteinte, chaux grasse (en raison de sa consistance et de sa plasticité). L'appellation standard est Calcium Lime (CL) suivi d'un chiffre indiquant la proportion de carbonate de calcium; CL 90 est la chaux aérienne la plus pure.
Synthèse d'hydroxyde de calcium :
ajouter de l'acide tartrique avec du calcaire
C4H6O6 + CaCO3 -> CO2 + Ca(OH)2 (équation non stochiométrique)
La chaux hydraulique[modifier]
La chaux hydraulique naturelle[modifier]
La chaux hydraulique naturelle était appelée autrefois « maigre ». Elle provient de calcaire contenant de 10 à 20% d'argile. La prise est hydraulique et son durcissement est aérien.
L'appellation standard est Natural Hydraulic Lime (NHL) :
- bonne résistance mécanique : NHL 2 (résiste à une compression de 20 bars tandis que NHL 5 résiste à 50 bars)
- NHL-Z, si elle n'est pas pure (elle peut contenir du ciment, du laitier de haut fourneau, ou toute sorte d'adjuvant ayant une prise hydraulique similaire).
La chaux hydraulique naturelle agit sur la qualité de l'air intérieur en raison de ses caractéristiques :
- Excellent volant hygrométrique : perméable à la vapeur d'eau (plus elle est hydraulique et moins elle est perméable : la NHL 5 par ex est presque aussi peu perméable que le ciment).
- Bon comportement à l'humidité et au gel.
- Imperméable à l'eau de ruissellement.
La chaux hydraulique artificielle[modifier]
Contrairement a ce que son nom laisse penser, il ne s'agit pas d'une chaux mais bien d'un ciment amaigri. Il provient de clinker de ciment et de fillers calcaire. Son appellation standard est Hydraulic Lime, HL. Cette appellation n'est désormais plus utilisée, ne contenant pas de chaux libre, elles ont retrouvé leur famille d'origine, les ciments, sous le nom de "ciments à maçonner".
La chaux magnésienne et dolomitique[modifier]
Il s'agit d' une chaux obtenu à partir d' un calcaire qui contient une bonne part ( jusqu'à 45% ) de Magnésium, la formule de la chaux dolomitique est CaOMgO
Exemple: le 'BATIDOL' en DL 85 (Dolomitic Lime)
Techniques de fabrication[modifier]
Chaux vive[modifier]
La chaux vive est obtenue en chauffant de la roche calcaire dans un four a chaux. Les fours a chaux sont encore présents dans nos campagnes.
Hydratation[modifier]
L'hydratation de la chaux est l'étape nécessaire à l'obtention de chaux éteinte, qu'elle soit aérienne ou hydraulique. Dans le cas de la chaux hydraulique, il est nécessaire d'employer la quantité juste nécessaire d'eau, afin de ne pas permettre la prise du matériau. Dans le cas de la chaux obtenue à partir de calcaire pur, la quantité d'eau n'est pas limitée. Lorsque la quantité d'eau ajoutée est juste suffisante pour obtenir la réaction d'extinction, c'est à dire d'hydratation de la chaux, on obtient une poudre blanche. Si la quantité d'eau est plus importante, on obtient une pâte blanche.
Cette étape occasionne une réaction très exothermique, qui nécessite l'usage d'un récipient résistant à la chaleur.
En cas de mélange de grandes quantités de chaux et d'eau, la chaleur dégagée est telle que l'eau se met à bouillir et peut projeter de la chaux, qui est corrosive. Il est de ce fait conseillé d'utiliser des lunettes et des gants lors de la manipulation.
Par la suite, la prise de la chaux se fait par carbonatation, c'est-à-dire que la prise aérienne se fait en associant le gaz carbonique de l'air avec l'hydroxyde de calcium. On obtient du carbonate de calcium (calcaire). C'est d'un calcaire semblable que la chaux fut extraite à l'origine par chauffage.
La chaux aérienne se conserve très bien des mois sous 20 cm d'eau.
Utilisations[modifier]
Construction[modifier]
La chaux aérienne est principalement employée pour les finitions intérieures et les peintures. Elle sert également à la fabrication des blocs de bétons cellulaires (dit bloc ytong du nom du fabricant).
La chaux hydraulique est utilisée :
- Pour les soubassements, pour monter des murs.
- Pour les enduits extérieurs, en raison de sa prise plus rapide et de sa moins grande sensibilité aux conditions climatiques lors de l'emploi. Un fixatif peut être rajouté lors de la préparation du badigeon : alun de potasse, latex, caséine.
- Pour faire des dalles, des chapes en y mélangeant du chanvre pour augmenter les performances thermiques, pour la pose de carrelages et de terre cuite, plancher bois etc... Seule condition : le matériau utilisé en finition doit impérativement être respirant. En effet, dans le cas contraire, il y aurait un phénomène de rétention d'eau dans la chape, et c'est incompatible avec le chanvre: Humidité + Végétal = putréfaction.
Pour préparer un mortier de chaux, mélanger à sec 1 volume de chaux avec 2,5 à 3 volumes de sable. Lorsque le mélange est bien homogène, ajouter l'eau de gâchage (1 volume pour maçonner, plus pour enduire). Il est parfaitement possible de maçonner avec de la chaux aérienne mais la prise sera plus lente. Pour lui donner une meilleure hydraulicité (capacité à effectuer sa prise dans l'eau), on peut ajouter au mortier de la chamotte (brique pilée) ou du tuileau (vieilles tuiles en terre cuite pilées). On peut aussi ajouter une part de limon (terre argileuse, idéale pour les torchis... ou la fabrication de briques), comme c'était fréquemment le cas dans les anciens bâtiments agricoles. Si on utilise une bétonnière, porter un masque pour se protéger de la poussière de chaux émise lors du brassage à sec. Le support doit être très bien humidifié : pulvériser abondamment la veille et juste avant de commencer le travail... Le mortier de chaux prend beaucoup plus lentement que le mortier de ciment. Ne pas monter plus de 20 à 30 cm de briques par jour (voire par deux jours dans le cas de la chaux aérienne).
Agriculture[modifier]
Pour l'agriculture on utilise de la chaux magnésienne, ou dolomitique, qui amende les sols acides en apportant du magnésium. Cet amendement est à utiliser modérément sur les sols argileux. Le rôle de l'ion calcium dans le complexe argilo-humique est déjà tenu par le fer. Par contre un trop grand apport de chaux peut libérer des bases faibles, dont des bases contenant de l'aluminium. Ces bases sont potentiellement très fréquentes dans les sols argileux ou d'aréne granitique (Silicate d'aluminium). Leur libération en quantité est dangereuse car elle favorise les maladies neurodégénératives. L'utilisation de sable de carrière à base de roches calcaires broyées est souvent préférable et moins chère, en agriculture. Des quantités de l'ordre de 150 kg/ha de sable sont parfois suffisantes pour les besoins des plantes et plus économiques que les recommandation des marchands d'amendements.
Antiseptique[modifier]
C'est surtout la chaux vive, utilisée dans les écuries et les étables, qui a des propriétés désinfectantes. Au contact de son pH très alcalin (environ 12), les micro-organismes se trouvant sur les parois badigeonnées sont détruits. L'application doit être cependant renouvelée régulièrement. Évitant la condensation, la chaux diminue le risque de prolifération des moisissures. La chaux offre une faible adhérence aux poussières.
Sidérurgie[modifier]
En Europe de l'Ouest, 30% de la production de la chaux calcique est utilisée dans la sidérurgie afin de capter certains éléments qui ne doivent pas entrer dans la composition de l'acier (Si et P).
Stabilisation des sols[modifier]
Peindre à la chaux[modifier]
Choix du liant[modifier]
Il dépend du support et des conditions d'application. D'une manière générale, sur supports non absorbants, donc mal humidifiables et dans des conditions médiocres d'application (vent, température élevée...), l'utilisation d'un liant ayant une prise rapide (chaux hydraulique naturelle) est privilégiée. Un liant aérien, par contre, permet de conserver ses laits de chaux. Cet intérêt est d'autant plus important dans le cas de grandes surfaces. Les échantillons présentés ont été réalisés avec de la chaux aérienne en poudre (C.L.).
Choix du lait de chaux[modifier]
Le badigeon (1 volume de chaux pour 2 à 3 volumes d'eau) est masquant, bouche-pores et aurait tendance à masquer la surface du support pour le rendre plus lisse.
La coloration des badigeons s'effectue à l'aide de pigments minéraux, on en exprime la quantité par rapport au poids de chaux.
Pour les badigeons, le pourcentage maximum est de 25 % du poids de chaux en poids de pigment pour les terres, 15 % pour les oxydes.
L'eau forte ou détrempe à la chaux (1 volume de chaux pour 5 à 6 volumes d'eau) est plus aquarellée, plus transparente.
On peut, par rapport au badigeon, ajouter un pourcentage de pigments plus important : jusqu'à 65 % du poids de chaux en poids de pigment pour les terres, 35 % pour les oxydes.
Stabilisation[modifier]
Une trop grande quantité de pigments dans un lait de chaux est un facteur défavorable pour sa tenue (farinage). Dans ce cas on le stabilise en apportant un liant de complémentarité (acryl, vinyle, ...). On considère que l'on adjuvante à partir de 20 % de terre ou 10 % d'oxyde.
L'adjuvantation d'un lait de chaux se fait sur la base de 5 à 10 % en poids d'extrait sec de résine par rapport à la masse à fixer. L'ajout de résine a tendance à réduire la porosité des laits de chaux.
Les échantillons d'eau forte ont été adjuvantés avec une résine de type dispersion aqueuse.
On peut également utiliser de la caséine... ou de la colle à papier peint (colle cellulosique).
Les pigments[modifier]
Pigments naturels : ocre jaune et ocre rouge; terre de sienne naturelle et calcinée; terre d'ombre naturelle et calcinée. Ils sont utilisés depuis l'antiquité.
Pigments artificiels : oxydes jaune, rouge, bleu et vert. Ils sont fabriqués depuis le XIXème siècle. Par exemple, le bleu de méthylène (en vente en pharmacie) permet d'obtenir ces bleus si typiquement méditerranéens...
Ces pigments minéraux compatibles avec la chaux sont miscibles entre eux.
Les couleurs pâlissent beaucoup en séchant. Mieux vaut faire quelques essais avant de se lancer.
Voir aussi[modifier]
Webographie[modifier]
- http://www.stgeorgevd.com/four.htm
- http://fr.wikipedia.org/wiki/Chaux_%28chimie%29
- http://www.lamaisondurable.com/2010/05/dalle-chaux.html
Bibliographie[modifier]
- Techniques et pratiques de la chaux, Ecole d'Avigon ([1]), ed: Eyrolles, 2e édition (c'est une très bonne référence!)
- La chaux naturelle: décorer, restaurer et construire, Julien Fouin, editions du Rouergue
- Ocres et Finitions à la chaux, Enduits décoratifs, stuck et tadelack, Vincent Tripard, EDISUD
- Ocres et peintures décoratives de Provence, Vincent Tripard, EDISUD
- Guide raisonné de la construction écologique 2007, Bâtir-Sain, ([2])