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=== L'ensemencement === | === L'ensemencement === |
Version du 23 novembre 2005 à 18:33
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Conserver des légumes pendant des mois, sans intervention de chaleur, de froid et sans aucun agent de conservation; le tout, en gardant intactes la fraîcheur et les vitamines, voici donc le miracle de la lacto-fermentation.
C'est un procédé si simple et si efficace qu'il est naturel de s'étonner du fait qu'il soit tombé dans l'oubli.
La théorie
La lacto-fermentation (ou lactofermentation, ou encore fermentation lactique) est comme son nom l'indique une fermentation qui fait intervenir des bactéries de type lactique. Elle est réalisée par des Streptococcus, Lactobacillus et certains Bacillus... Vingt-sept souches de bactéries lactiques ont pu être isolées de la choucroute. Le milieu s'acidifie progressivement et empêche la prolifération des autres micro-organismes, notamment les micro-organismes pathogènes ou indésirables comme les moisissures.
Avantages de la lacto-fermentation
La lacto-fermentation enrichit l'aliment alors que la stérilisation l'appauvrit:
- goût: le lait stérilisé a-t-il un goût agréable (comparé à du lait cru ou à un yaourt). Même question pour un fromage au lait cru ou non.
- vitalité: les aliments fermentés sont des aliments vivants.
- nutrition: protéines et vitamines sont mieux conservées, l'aliment est enrichi par la lacto-fermentation, par les micro-organismes qui synthétisent des éléments vitaux.
- protection: protection contre les micro-organismes pathogènes grâce à l'acidification du milieu.
Par exemple, la teneur en vitamine C de la choucroute augmente de plus de moitié au cours de la lacto-fermentation (elle passe de 50 à 80 g/ kg), les teneurs en vitamines B12 et PP augmentent notablement. Les aliments lacto-fermentés sont donc une excellente source de vitamines, surtout en hiver lorsque les légumes frais deviennent rares.
Parmi les acides organiques c’est l’acide lactique qui présente le plus d’efficacité à l’encontre des bactéries pathogènes, responsables des putréfactions. Mais il n’a pas cette action acidifiante dans notre organisme où il assainit le tube digestif et renforcerait les protections immunitaires. De plus les jus de produits lacto-fermentés crus contiennent de nombreuses bactéries utiles à notre flore intestinale qu’elles rajeunissent.
Histoire
Le légume lacto-fermenté le plus connu est sans conteste le chou blanc. Mais il semble bien qu'avant que naisse la choucroute, liée à la culture du chou, se pratiquait la lacto-fermentation de plantes de cueillette: herbes, légumes, jeunes feuilles d'arbres.
Anciennement, les soupes faites de légumes lacto-fermentés ont eu une importance alimentaire difficilement concevable de nos jours (avec nos techniques de surgélation, pasteurisation, stérilisation...) Les légumes lacto-fermentés étaient alors une des rares méthodes pour consommer des légumes feuilles en hiver.
Ces aliments étaient d'autant plus précieux que les sources de vitamine C que nous consommons actuellement en hiver n'étaient pas disponibles à cette époque là.
La fermentation de jeunes plantes sauvages était encore pratiquée dans les Alpes vers les années 1850.
L'histoire de la choucroute met aussi en valeur le fait qu'elle à permit de préserver du scorbut les populations qui en consommaient; notamment durant les longues traversées en mer. Le scorbut étant du à une carence en vitamine C.
Les produits issus de la lacto-fermentation
- Idli: préparation fermentée à base de haricots et de riz. Origine: Inde.
- Bonito: une préparation fermentée à base de haricots et de riz. Origine: Japon.
- Miso: pate fermentée à base de soja. Origine: Asie.
- Shoyu: un mélange de soja et de blé. Origine: Asie.
- Nuoc-mam: sauce fermentée à base de poisson. Origine: Asie.
- Kefir: lait fermenté très légèrement alcoolisé. Origine: Caucase.
- Choucroute: préparation fermentée à base de chou vert.
- le lait caillé, yaourt, fromages....
Technique
Les phases
- Pendant la pré-fermentation qui dure en général 2 ou 3 jours, de très nombreuses espèces de micro-organismes se développent. Les légumes commencent à se décomposer et ramollissent.
- L'acidification démarre quand les bactéries lactiques prennent le dessus sur les autres organismes. De nouvelles substances sont produites (de l'acide lactique bien sûr, mais aussi des vitamines et d'autres composés).
- Quand le pH (l'acidité) du milieu atteint une valeur inférieur à 4,1 (au bout de 2 ou 3 semaines), les micro-organismes indésirables ne peuvent plus se développer. Entre 3,5 et 4, la multiplication des bactéries lactiques s'arrête. Commence alors la phase de stockage pendant laquelle se forment les nouveaux arômes.
Les ingrédients
Les légumes
Il est possible de faire lacto-fermenter la plupart des légumes (ail, côte de bette, betterave, carotte, céleri, champignons, choux de toutes sortes, concombre, courgette, fève, haricot vert, navet, oignon, petit pois, poivron, potiron, radis, scarole, tomate...). Ils doivent être issus de culture naturelle: une des principales causes d'échec lors de la lacto-fermentation est l'utilisation de légumes ayant subi des traitements ou des amendements chimiques. Une longue période pluvieuse n'est favorable ni aux légumes dont la teneur en sucre et la concentration en substances aromatiques diminuent ni aux bactéries lactiques présentes à la surface des légumes. Quelques jours de soleil et de chaleur remédient à ces inconvénients. A noter que la tomate bien mûre (la tomate verte contient trop de solanine, substance toxique) contient des substances de croissance favorisant la multiplication des bactéries, on peut en ajouter à toutes les préparations.
Les aromates
Ail, aneth, coriandre, cumin, estragon, feuille de cassissier, griottier, framboisier, genièvre, laurier, moutarde, piment, raifort, sarriette, thym... Non seulement les aromates apportent saveurs et arômes aux préparations, mais ils sont également riches en substances actives. Ainsi, l'ail, les baies de genièvre et le piment contribuent à empêcher la pourriture; les feuilles de framboisier et de cassissier sont riches en bactéries lactiques; les baies de genièvre et le cumin facilitent la digestion de la choucroute.
L'eau
Il est recommandé d'utiliser de l'eau de source (pas de l'eau en bouteille!). Si l'on utilise de l'eau du robinet, il faut la laisser reposer une nuit ou la faire bouillir quelques minutes pour que le chlore s'évapore.
le sel
Le sel permet d'un part d'accélérer la libération du jus hors des cellules et donc d'accélérer la mise en anaérobiose et d'autre part, de sélectionner des bactéries "osmophiles" et d'empêcher le développement de bactéries pathogènes (la plupart d'entre elles supportant mal le sel à forte dose). Le sel marin est recommandé pour sa teneur en minéraux et en oligo-éléments. La quantité de sel nécessaire dépend de la qualité des légumes. Un manque de sel peut conduire à une fermentation alcoolique et au pourrissement des légumes, mais il est tout de même possible de faire une choucroute sans sel. Si celle-ci se développe bien, elle aura plus de goût que la choucroute traditionnelle (salée), mais le risque de développement de bactéries putréfiantes est beaucoup plus grand.
L'ensemencement
Il n'est pas indispensable, il favorise et guide la fermentation. Le petit-lait, riche en lactose, vitamines et sels minéraux, favorise la fermentation des légumes pauvres en éléments nutritifs comme les concombres. Le jus de préparations lacto-fermentées (notamment le jus de concombre) permet un démarrage rapide de la fermentation.
Le matériel
Il n'est pas besoin de matériel sophistiqué pour lacto-fermenter.
Les récipients: les bocaux en verre à vis (que l'on récupère aisément), tout comme les bocaux à joint, conviennent parfaitement, ils permettent de faire de multiples essais et d'ouvrir les bocaux au fur et à mesure de sa consommation. Les pots à joint d'eau sont des récipients spécialement conçus pour la lacto-fermentation: ils laissent s'échapper le gaz carbonique produit par la fermentation mais empêchent l'entrée d'air et donc d'oxygène néfaste à la lacto-fermentation. Traditionnellement, on utilisait des récipients ouverts (tonneau en chêne, pot en grès), ces récipients nécessitent plus d'attention et une mise en place plus compliquée (linge, planchette, pierres...).
La préparation des légumes consiste à les éplucher, les couper ou les râper. Un bon couteau de cuisine, un couteau économe (ou épluche-légume) et une râpe suffisent amplement. Il existe des instruments spécialisés tels le rabot à choucroute ou le dérouleur de navet, ils n'ont d'intérêt que pour les très grandes quantités.
La mise en pot demande de tasser fortement les légumes. Selon la taille du pot, on utilise un pilon, le poing ou les pieds. Pour les récipients ouverts, il faut de plus placer une planchette recouverte d'un linge et lestée d'une pierre pour faire pression sur les légumes.
La réalisation
Préparation
Il existe de très nombreuses recettes pour préparer les légumes lacto-fermentés avec autant de variantes mais elles s'appuient généralement sur un des deux principes suivant:
- réduire les légumes en petits morceaux (émincés ou râpés),
- les mêler au sel et aux aromates,
- remplir le récipient en tassant fortement,
- éventuellement, ensemencer avec du petit-lait ou du jus de légumes lacto-fermenté,
- couvrir d'eau si les légumes n'ont pas rendu suffisamment de jus,
- fermer le récipient ou placer la planchette pour les récipients ouverts.
ou
- laisser les légumes entiers (haricot, bouton de fleurs, cornichons) ou coupés en morceaux,
- préparer une saumure (30 gr. de sel par litre),
- remplir le récipient de légumes,
- couvrir avec la saumure,
- fermer le récipient ou placer la planchette pour les récipients ouverts.
La fermentation
Une fois la préparation achevée, la fermentation est influencée par la température à laquelle on place les pots. Au départ, il est important d'avoir une température supérieure à 15°C et inférieure à 25°C pour que la fermentation démarre rapidement, la température optimale se situant, selon les légumes, entre 18°C et 22°C. Une méthode simple pour guider la fermentation en température consiste à laisser les pots à la cuisine pendant 3 jours puis de les placer dans un endroit plus frais (la cave, le cellier...) jusqu'à consommation. Il est par ailleurs possible de contrôler plus précisément la température pour obtenir un produit plus raffiné. Voici quelques données indicatives qui ne sont pas des règles absolues :
pré-fermentation | acidification | stockage | |
chou | 20 à 22°C pendant 2 j. | 15 à 18°C pendant 14 à 21 j. | 0 à 10°C |
potiron | 1 à 20°C pendant 8 à 10 j. | 0 à 10°C pendant 6 à 8 sem. | 0 à 10°C |
carotte | 20°C pendant 2 j. | 18°C pendant 10 à 14 j. | 0 à 10°C au moins 4 sem. |
concombre | 18 à 20°C pendant 2 j. | 18°C pendant 10 à 14 j. | 0 à 10°C |
Pour la phase de stockage, il est parfois préconisé de placer les pots dans le bas du réfrigérateur. Cela nous semble peu cohérent dans la mesure où la réfrigération est vorace en énergie alors que la lacto-fermentation permet justement d'éviter la consommation d'énergie (contrairement à la stérilisation, la pasteurisation, la congélation ou la surgélation...). Si la température s'élève au-dessus de 10°C, cela ne compromet en rien la conservation des aliments, ils seront simplement un peu plus acides. Elle influence cependant la durée de conservation mais les légumes se conservent aisément plus d'un an même si la température est supérieure à 10°C.
Influence de divers paramètres
Le sel
Il favorise les bactéries lactiques au détriment des autres organismes. L'activité des micro-organismes aérobies lors de la pré-fermentation est donc fortement influencée par la teneur en sel. Ce sont ces micro-organismes qui ramollissent les légumes. Si l'on veut des légumes croquants, on mettra plus de sel, si l'on veut les amollir, on en mettra moins.
La température
Plus la température est élevée, plus les bactéries sont actives. Durant la pré-fermentation, une température élevée favorise l'amollissement des légumes. Une température basse lors de la phase de stockage permet de conserver des sucres nécessaires à la formation des arômes. Ainsi, les préparations faites en été ont tendance à être très acides et moins goûteuses, tous les sucres étant transformés en acide lactique. Si les conditions ne permettent pas une température basse, on raccourcit la durée de pré-fermentation et d'cation.
L'ensemencement
Il consiste à apporter un "levain": des bactéries lactiques et un milieu qui leur est favorable (petit-lait, jus de légume lacto-fermenté); de ce fait, il a le même type d'influence que le sel sur la consistance des légumes: plus on apporte de "levain", plus les légumes sont croquants. De plus, l'ensemencement oriente fortement la fermentation et la saveur du produit final puisqu'il apporte des bactéries spécifiques (au petit-lait ou aux concombres par exemple). Le même légume fermenté dans les mêmes conditions avec ou sans ensemencement n'aura pas le même goût.
la taille des morceaux
Elle influe sur la quantité de sucre libérée lors de la fermentation et donc sur l'acidité du produit final. Des légumes entiers ou des gros morceaux libéreront peu de sucre et seront moins acides.
Conditions optimales
- Les aliments doivent fournir les éléments nutritifs indispensables aux bactéries lactiques, essentiellement du sucre (sous forme d'amidon dans les céréales, de fructose ou de saccharose dans les fruits, de lactose dans le lait), des vitamines du groupe B et des sels minéraux. Tous ces éléments sont présents dans une plante saine cultivée naturellement sans pesticide ni engrais de synthèse.
- La température doit être de l'ordre de 20°C en début de fermentation.
- L'oxygène doit être éliminé (par immersion dans l'eau par exemple)
- La concentration en sel doit être comprise entre 0,5 et 1,5% du poids des légumes. Elle permet d'inactiver les enzymes responsables de la décomposition des légumes et notamment des protéines.
Conservation
Dans des condition optimales, les légumes lacto-fermentés peuvent se conserver ainsi plus d'une année.
Les risques, la fermentation est-elle réussie ?
Il existe des bactéries présentant un risque important. Ainsi, Clostridium butyricum est une bactérie anaérobie, sporulée qui dégrade la préparation et produit des gaz. L'odeur d'acide butyrique (odeur grasse) est témoin d'une mauvaise fermentation. Le développement de bactéries non souhaitables: coliformes, bactéries aérobies et moisissures peut entraîner la production d'histamine, d'ammoniaque, d'hydrogène sulfureux, de méthane et de diverses amines nauséabondes. Les odeurs ammoniacales doivent vous conduite à jeter la choucroute ratée car elles traduisent une augmentation du pH et donc la possibilité du développement de bactéries pathogènes. Une mauvaise fermentation dégage une odeur nauséabonde et les aliments ont un goût de moisi ou de pourri. Elle est souvent due à une température trop basse ou trop élevée au départ ou au contact avec l'air (légumes non immergés).
Dans une choucroute réussie, la couleur du chou doit rester très claire; un brunissement indiquerait une oxydation et donc un produit de moins bonne qualité. La simple observation du produit final nous indique si la fermentation est réussie. Les légumes obtenus doivent être appétissants, d'une saveur agréable et acidulée.
Bibliographie
- Les aliments fermentés traditionnels, Claude Aubert, ISBN 2904082069
Webographie
- http://www.vignes.be/choucrou.htm Choucroute et lacto-fermentation
- nimasadi.kiosq.info : La lactofermentation
- LE MISO TRADITIONNEL