Énergie nucléaire : Différence entre versions

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L''''énergie nucléaire''' désigne l'énergie libérée par la fission ou la fusion des noyaux des atomes.
  
L''''énergie nucléaire''' désigne l'énergie libérée par la fission ou la fusion au niveau des noyaux des atomes.  
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Cet article traite essentiellement de son usage civil pour la production d'électricité.
 
 
  
 
== Introduction ==
 
== Introduction ==
  
Découverte dans les années 1930, la fission nucléaire est utilisée à des fins civiles et militaires. Elle consiste à scinder un noyau atomique lourd (uranium par exemple) en noyaux plus petits. 1% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé par les centrales nucléaires actuels et par les premières bombes atomiques.
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Découverte dans les années 1930, la fission nucléaire est utilisée à des fins civiles et militaires. Elle consiste à scinder un noyau atomique lourd (uranium par exemple) en noyaux plus petits. 1% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé par les centrales nucléaires actuelles et par les premières bombes atomiques.
 
 
La fusion nucléaire consiste à fusionner deux petits noyaux en un plus gros (typiquement : hydrogène et deutérium, de l'hydrogène lourd, fusionnent en un noyau d'hélium). 10% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé actuellement par les bombes à hydrogène. D'éventuels usages civils sont très prometteurs (hydrogène et deutérium se trouvent aisément et l'hélium produit ne serait pas radioactif) mais les recherches menées depuis 30 ans n'ont toujours pas abouties même si des progrès ont été réalisés.
 
  
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La fusion nucléaire consiste à fusionner deux petits noyaux en un plus gros (typiquement, deux noyaux d'hydrogène fusionnant en un noyau d'hélium). 10% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé actuellement par les bombes à hydrogène. D'éventuels usages civils sont théoriquement prometteurs (hydrogène et deutérium se trouvent aisément et l'hélium produit ne serait pas radioactif) mais les recherches menées depuis 40 ans n'ont toujours pas abouties.
  
 
== Place de l'énergie nucléaire ==
 
== Place de l'énergie nucléaire ==
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{{loupe|Limites des énergies renouvelables}}
  
Aujourd'hui, l'énergie nucléaire représente 80% de la production électrique française et 6.5% de la production électrique mondiale. Cette énergie constitue une alternative aux énergies fossiles, ce à quoi les énergies renouvelables ne peuvent que partiellement prétendre de par leurs [[limites des énergies renouvelables|limites]]. Par exemple, l'énergie éolienne et photovoltaïque ne peuvent produire en l'absence de vent ou de soleil. Et puisqu'il est beaucoup trop coûteux et problématique de stocker l'électricité en masse, quand bien même nous développerions les énergies renouvelables à leur maximum en France, nus aurions toujours besoin de centrales conventionnelles, fossiles ou nucléaire, capables de produire sur demande.
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Aujourd'hui, l'énergie nucléaire représente 75% de la production électrique française mais seulement 9.5% de la production électrique mondiale. Les énergies renouvelables produisent beaucoup plus, leur part (en augmentation continue) a dépassé 20% de la production mondiale (cf Key worl energy statistics, AIE), dont 17% d'hydroélectricité. Les renouvelables constituent donc la principale alternative aux énergies fossiles.
  
Cela dit, la puissance d'une centrale nucléaire ne peut pas être rapidement ajustée, il faut une heure pour arriver à plein puissance en partant d'une centrale nucléaire au repos. Au mieux, elle ne peut donc fournir que le gros de la production. Les variations rapides de la consommation (ou de la production des renouvelables : baisse du vent, de la luminosité) doivent toujours être compensées par les centrales fossiles. Dès lors, l'essor des énergies renouvelables fait que le secteur nucléaire devra se contracter pour laisser une part plus grande aux centrales fossiles.
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De plus, la puissance d'une centrale nucléaire ne peut pas être rapidement ajustée, il faut environ une heure pour arriver à pleine puissance en partant d'une centrale nucléaire au repos. Au mieux, elle ne peut donc fournir que le gros de la production. Les variations rapides de la consommation (ou de la production des renouvelables : baisse du vent ou de la luminosité) peuvent toujours être compensées par exemple par l'hydroélectricité.
  
 
Enfin, le nucléaire ne peut prétendre à se substituer largement dans le monde aux énergies fossiles : les stocks disponibles de combustible seraient trop faibles et tous les pays ne disposent pas des compétences et de la stabilité nécessaires.<ref>[http://www.notre-planete.info/actualites/actu_1291.php Le nucléaire : une solution d'avenir ?] - notre-planete.info</ref>
 
Enfin, le nucléaire ne peut prétendre à se substituer largement dans le monde aux énergies fossiles : les stocks disponibles de combustible seraient trop faibles et tous les pays ne disposent pas des compétences et de la stabilité nécessaires.<ref>[http://www.notre-planete.info/actualites/actu_1291.php Le nucléaire : une solution d'avenir ?] - notre-planete.info</ref>
  
=== Quelles alternatives réalistes au nucléaire pour la France ? ===
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=== Alternatives pour la France ===
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{{loupe|Propositions énergétiques pour la France}}
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[[Image:Nuclear-futur.jpg|thumb|270px|Centrales nucléaires entre Beijing et Tianjin (Chine)]]
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L'alternative la plus simple serait de faire ce qu'on l'on fait dans la plupart des pays développés (hormis ceux ayant un potentiel hydroélectrique exceptionnel, comme le Brésil) : utiliser principalement les [[Énergie fossile|énergies fossiles]], notamment le [[charbon]], pour un coût de l'électricité globalement similaire et des émissions de [[gaz à effet de serre]] fortement accrues. Mais serait-il possible de miser avant tout sur les [[énergies renouvelables]] ?
  
[[Image:Nuclear-futur.jpg|thumb|270px|Centrales nucléaires entre Beijing et Tianjin (Chine)]]
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== Coûts financiers ==
L'alternative la plus simple serait de faire ce qu'on l'on fait dans la plupart des pays développés (hormis ceux ayant un potentiel hydroélectrique exceptionnel, comme le Brésil) : utiliser principalement les [[énergies fossiles]], notamment le [[charbon]], pour un coût de l'électricité globalement similaire et des émissions fortement accrues (environ 50% avec du gaz naturel, 100% avec du charbon). Mais serait-il possible de miser avant tout sur les [[énergies renouvelables]] ?
 
  
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Aujourd'hui, la France dispose d'un tarif électrique dans la moyenne européenne<ref>[http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/energie-prix-du-gaz-electricite-europe.html Viepublique.fr] - Le coût de l'électricité en France.</ref> et indépendant des cours des énergies fossiles qui augmenteront sur le long terme. Mais la question du coût réel et futur de l'énergie nucléaire fait l'objet d'une controverse. Les raisons en sont les suivantes :
  
L'association ''Sortir du nucléaire'' a proposé un plan<ref>[http://www.sortirdunucleaire.org/sinformer/brochures/sorties5ou10ans/ETUDE-SORTIES-web.pdf Plan de sortie du nucléaire en 5 à 10 ans] par ''Sortir du Nucléaire''</ref> de sortie en 5 à 10 ans qui utiliserait au maximum les économies d'énergie et se résoudrait à utiliser les énergies fossiles lorsqu'aucun autre choix ne serait possible. Voilà ce qu'il en ressort :
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* Les premiers investissements dans le nucléaire civil furent réalisés par l'État français et non par EDF, le budget de cette entreprise ne fut donc pas grévé par les emprunts correspondants. Or, la France va devoir renouveler son parc si elle maintient son choix nucléaire. En France, ce coût serait estimé à 345 milliards d'euros<ref>[http://www.sortirdunucleaire.org/actualites/dossiers/energie/flop-economique.pdf Sortir du nucléaire - Le flop économique]</ref> (plutôt 500 milliards en fait : ces chiffres étaient basés sur l'expérience anglaise alors que la France miserait sur l'EPR, plus coûteux au départ). La somme semble gigantesque mais il faut relativiser : sur 40 ans et en conservant la production actuelle de 400 TWh, cela représenterait 2 centimes par kWh.
* Les émissions de {{CO2}} seraient augmentées de 20%, du fait du remplacement des dispositifs électriques de confort thermique (climatisation, chauffage) par l'usage du gaz naturel (même si le bois est privilégié), ce qui contredit les objectifs de réduction des émissions.
 
* Les centrales fossiles en elles-mêmes émettraient beaucoup plus de {{CO2}} mais leurs émissions seraient enterrées dans le sol via des procédés controversés de [[stockage géologique du CO2]].
 
* Le plan inclut un déploiement très rapide d'importantes mesures d'économie d'énergie qui, de toute façon, devront être mises en œuvre pour satisfaire les objectifs de Kyoto et ce quels que soient nos futurs choix énergétiques. Le fait qu'en dépit de ces économies le plan prévoit une hausse des émissions le dispose comme peu apte à satisfaire de futurs objectifs de réduction des émissions.
 
* Les questions de coûts financiers ne sont jamais abordés. Si l'on passe sur la question des sommes nécessaires à une transition si rapide pour l'envisager dans le long terme, la redondance des installations (fossiles + renouvelables + stockage), les tendances à long terme du coût des énergies fossiles et la moindre efficacité des énergies renouvelables laissent deviner que le coût au kWh pourrait plus que doubler. Mais il est vrai aussi que la consommation baisserait significativement dans un tel plan.
 
* La plan mise fortement sur le gaz naturel en ignorant les questions géostratégiques qui y sont liées : les gisements russes seront bientôt épuisés, des difficultés persistent pour nos approvisionnements au Maghreb et en Asie mineure.
 
  
== Coûts financiers ==
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* Un autre facteur est le coût de la matière première. En réponse aux tendances inflationnistes sur le long terme des énergies fossiles, l'énergie nucléaire connaît un nouvel essor mondial, ce qui exerce une pression sur les prix des combustibles. Cela dit, le coût de ces matières premières ne représente aujourd'hui que 12% du coût de production.<ref>[http://nucleaire.cea.fr/fr/repere/nucleaire_economie.htm CEA - L'économie du nucléaire]</ref> et l'EPR devrait consommer moins de combustible (22% de gain d'efficacité annoncés). Même si ce coût venait à doubler, le prix final n'en serait que peu affecté.
  
Aujourd'hui, la France dispose d'un tarif électrique dans la moyenne européenne<ref>[http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/energie-prix-du-gaz-electricite-europe.html Viepublique.fr] - Le coût de l'électricité en France.</ref> et peu soumis aux variations des prix des énergies fossiles dont les prix augmenteront sur le long terme. Mais la question du coût réel, sur le long terme, de l'énergie nucléaire est peu clair et fait l'objet d'une controverse. Les raisons sont les suivantes :
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* Le coût du démantèlement est également souvent évoqué comme une autre source d'énigme. Initialement grandement sous-estimé, les expériences se sont multipliées ces dernières années, en France et à l'étranger, et on commence à en avoir une meilleure idée. Celui-ci serait en fait supérieur à dix milliards.<ref>[http://www.romandie.com/infos/news2/100721095124.4f1ixszu.asp Romandie News] - EDF envisage d'affecter 50% de RTE au démantèlement des centrales.</ref> Là encore, il n'y pas vraiment de quoi questionner le choix nucléaire.
  
* Les premiers investissements dans le nucléaire civil furent réalisés par l'État français et non par EDF, le budget de cette entreprise ne fut donc pas grévé par les emprunts correspondants. Or, la France va devoir renouveler son parce si elle maintient sa politique énergétique. En France, ce coût du renouvellement serait estimé à 345 milliards d'euros<ref>[http://www.sortirdunucleaire.org/actualites/dossiers/energie/flop-economique.pdf Sortir du nucléaire - Le flop économique]</ref> (plutôt 500 milliards en fait, ces chiffres étaient basés sur l'expérience anglaise alors que la France miserait sur l'EPR, plus coûteux). La somme est gigantesque mais il faut relativiser : sur 40 ans et en conservant la production actuelle de 400 TWh, cela représenterait 2 centimes par kWh.
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* Dans le contexte nucléaire, l'État français a poussé au développement de dispositifs électriques de confort thermique, peu coûteux à l'achat mais ayant un faible rendement énergétique : pour produire une calorie thermique, il a fallu produire plus de deux calories électrique. Qui plus est, durant les pointes hivernales, on fait appel à de l'électricité d'origine fossile (jusqu'à 30%) en partie importée d'Allemagne. Sur le plan des émissions de {{CO2}}, l'opération reste légèrement avantageuse mais pas en termes de dépenses pour les usagers.<ref>[http://www.manicore.com/documentation/chauffage_electrique.html Manicore - Chauffage électrique]</ref>
  
* Un autre facteur est le coût de la matière première. En réponse aux tendances inflationnistes sur le long terme des énergies fossiles, l'énergie nucléaire connaît un nouvel essor mondial, ce qui exerce une pression sur les prix des combustibles. Cela dit, le coût de ces matières premières ne représente aujourd'hui que 12% du coût de production.<ref>[http://nucleaire.cea.fr/fr/repere/nucleaire_economie.htm CEA - L'économie du nucléaire]</ref>. Même si ce coût venait à doubler, le prix final n'en serait que peu affecté.
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* Certains coûts sont externalisés : la pollution environnementale (problème existant aussi pour les centrales fossiles), le coût de la sécurité (prise en charge par l'armée) et surtout les déchets pour lesquels aucune stratégie de long terme n'a été définie et ne font pas l'objet de provisions financières.
  
* Le coût du démantèlement est également souvent évoqué comme une autre source d'énigme. Initialement grandement sous-estimé, les expériences se sont multiplées ces dernières années, en France et à l'étranger et on commence à en avoir une meilleure idée. Celui-ci serait en fait supérieur à dix milliards.<ref>[http://www.romandie.com/infos/news2/100721095124.4f1ixszu.asp Romandie News] - EDF envisage d'affecter 50% de RTE au démantèlement des centrales.</ref> Là encore, pas de quoi grandement réévaluer le coût du nucléaire.
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Enfin, il faut prendre en compte que puisque la seule alternative au nucléaire ayant des émissions faibles de {{CO2}} est un mélange renouvelables-fossiles, et puisque ces solutions sont elles-mêmes coûteuses (redondance des installations, cours à long terme des combustibles fossiles, coûts élevés des solutions renouvelables), le nucléaire semble bien apparaître comme économiquement pérenne et avantageux.
  
* Enfin, il faut prendre en compte que puisque la seule alternative au nucléaire ayant des émissions faibles de {{CO2}} est un mix renouvelables-fossiles, et puisque ces solutions sont elles-mêmes coûteuses (redondance des installations, coût à long terme du combustible fossile, coûts élevés des solutions renouvelables), le nucléaire apparaît bien comme économiquement efficace.
 
  
 
== Sécurité ==
 
== Sécurité ==
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''Le court article sur la [[radioactivité]] vous éclairera sur ces problèmes et les unités utilisées.''
  
 
En substance, une installation nucléaire civile présente des risques comparables à d'autres activités industrielles : déflagration et contamination. Mais la nature de la radioactivité place les installations nucléaires parmi les industries les plus dangereuses. Concernant la contamination, nous verrons ce qu'il en est plus tard, en examinant les accidents qui eurent lieu dans le passé.
 
En substance, une installation nucléaire civile présente des risques comparables à d'autres activités industrielles : déflagration et contamination. Mais la nature de la radioactivité place les installations nucléaires parmi les industries les plus dangereuses. Concernant la contamination, nous verrons ce qu'il en est plus tard, en examinant les accidents qui eurent lieu dans le passé.
  
Concernant une déflagration, on parle de risques d'explosion chimique et non nucléaire : les installations nucléaires conventionnelles n'utilisent pas de réactifs nécessaires à une explosion nucléaire. En revanche, certains réacteurs militaires ou des réacteurs civils expérimentaux à neutrons rapides (comme le fut Superphénix mais il n'en existe plus en France) peuvent manipuler ce genre de produits. Ça ne signifie pas que le risque soit négligeable : une explosion chimique peut être particulièrement violente, il suffit de se rappeler celle de l'usine AZF de Toulouse. Enfin, une explosion tend à disperser les produits qui se trouvent sur place.  
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A propos de déflagrations, on parle de risques d'explosion chimique et non nucléaire : les installations nucléaires conventionnelles (tous les réacteurs français) n'utilisent pas de réactifs susceptibles de causer une explosion nucléaire. En revanche, certains réacteurs militaires ou des réacteurs civils expérimentaux à neutrons rapides (comme le fut Superphénix mais il n'en existe plus en France) peuvent manipuler ce genre de produits. Ça ne signifie pas que le risque soit négligeable : une explosion chimique peut être particulièrement violente, il suffit de se rappeler celle de l'usine AZF de Toulouse. Et, surtout, une telle explosion disperse les produits radioactifs qui sont sur place.  
  
=== Comprendre et mesurer la radioactivité ===
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Enfin, notons que même si les accidents sont rendus improbables, ils finiront toujours par arriver sur une période suffisamment longue. La question est donc de savoir si le nucléaire constitue un risque acceptable ou non.
[[Image:Loi exponentielle.gif|right|Loi exponentielle selon laquelle la radioactivité diminue]]
 
Dans un matériau radioactif, des noyaux atomiques se désintègrent spontanément en d'autres noyaux plus légers et émettent au passage des rayonnements. C'est un phénomène naturel qui a toujours existé sur Terre et nous sommes en permanence baignés par une légère radioactivité naturelle. A dose faible, la radioactivité n'est pas dangereuse, elle a même un effet bénéfique. La dangerosité dépend de la nature des rayonnements émis et de leur quantité (liée au nombre de désintégrations par seconde). Les rayonnements alpha sont arrêtés par une simple feuille de papier, les rayonnements bêta par une feuille d'aluminium, tandis que les rayonnements gamme ne sont qu'atténués par le plomb, décroissant exponentiellement selon l'épaisseur du plomb.
 
  
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=== Différences entre les réacteurs conventionnels et Tchernobyl ===
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[[Image:Thermal_reactor_diagram.png|thumb|Schéma du fonctionnement d'un réacteur nucléaire conventionnel]]
  
En termes d'impact sur les organismes vivants, on s'intéresse surtout à l'énergie de radiation reçue par unité de masse des corps vivants. On utilise pour cela le ''gray'' qui représenté l'énergie reçue par unité de masse (J/kg). Mais tous les rayonnements ne sont pas aussi dangereux l'un que l'autre et seule une partie du rayonnement est absorbée (cela dépend des organes exposés, etc). On utilise donc une autre unité synthétique qui exprime directement la gravité d'une exposition aux rayonnements pour un organisme vivant : c'est le ''sievert'' (Sv) qui représente l'énergie efficace absorbée par unité de masse (J/kg). On utilise parfois aussi le ''rem'', correspondant à 10 mSv (millisieverts).
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Une condition généralement admise pour qu'un réacteur nucléaire ne puisse s'emballer est qu'il soit conçu de façon à ce que la réaction de fission ne puisse se produire que lorsque les systèmes sont actifs et générer lui-même, naturellement, les conditions qui le pousseront à s'arrêter en cas de problème. Autrement dit il doit présenter des rétro-actions négatives.<ref>[http://www.world-nuclear.org/info/inf06.html World Nuclear - Safety of Nuclear Reactors]</ref>
  
La limite légale d'exposition des personnels du nucléaire est de 20 mSv (0.02 Sv) par an et la radioactivité naturelle nous expose à 1 mSv par an. Voici les seuils de gravité d'une exposition reçue sur une période très courte :
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Par exemple, dans les réacteurs conventionnels (y compris l'EPR), l'eau agit à la fois comme modérateur (la couche qui ralentit les neutrons) et fluide caloporteur (chargé de refroidir le réacteur). Si la réaction s'accroît, l'eau chauffe (caloporteur) et sa densité diminue. Puisque l'eau est aussi le modérateur, les neutrons ne sont plus ralentis et arrivent trop vite pour provoquer d'autres fissions : ils s'échappent alors vers les couches de confinement et la réaction tend à s'éteindre. On parle pour de tels réacteurs de coefficients de vide négatifs.<ref>[http://www.world-nuclear.org/info/chernobyl/voidcoef.htm World Nuclear - Positive Void Coefficient]</ref>. Toutefois, on a vu à Fukushima que dans certains cas des conditions persistent qui permettent à la réaction de se dérouler sans toutefois s'emballer.
* < 0.1 Sv : aucun effet notable.
 
* 0.5 Sv : élévation de la morbidité sans signe clinique, 7% de mortalité en plus dans les 30 années suivantes.
 
* 1 Sv : premiers symptômes d'un mal des rayons, hospitalisation recommandée. 14% de mortalité en plus dans les 30 années suivantes.
 
* 5 Sv : très graves symptômes, hospitalisation requise, 50% de mortalité dans les jours qui suivent.
 
  
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Le réacteur de Tchernobyl, en revanche, présentait un coefficient de vide positif. Voilà pourquoi, en 3 à 5s, la réaction a pu s'emballer et être multipliée par cent, restant par la suite 15 jours en activité. Tous les réacteurs français ont un coefficient de vide négatif et il est interdit aux États-Unis de construire des réacteurs à coefficient de vide positif. Beaucoup de centrales soviétiques ont encore un coefficient de vide positif mais des aménagements de sécurité ont été ajoutés suite à Tchernobyl. Au Canada, tous les réacteurs CANDU présentent un coefficient de vide positif mais assez faible. Les autorités canadiennes arguent que ce faible coefficient leur laisserait assez de temps avant l'emballement pour prendre les mesures nécessaires, ce qui est vrai tant que les conditions le leur permettent et que les systèmes de secours se comportent normalement (à Tchernobyl, le retrait des barres de combustible fut impossible, les mécanismes ayant été tordus par la chaleur).<ref>[http://www.nuclearfaq.ca/cnf_sectionD.htm Nuclearfaq.ca]</ref>
  
La radioactivité disparaît selon une loi exponentielle, comme illustré sur l'image ci-contre. On utilise le concept de demi-vie : si la demie-vie est de 30 ans, après cette période la radioactivité initiale aura été divisée par deux. Par 4 après 60 ans, par 8 après 90 ans, par 16 après 120 ans, etc... Certains rayonnements émis peuvent toutefois contaminer leur environnement, le rendant à son tour radioactif. Tout dépend de la matière touchée et de la nature des rayonnements émis. Des mesures de décontamination sont possibles, à base de traitement à l'iode et, pour la terre par exemple, en enfouissant les couches superficielles de terre sous une profondeur de 20m de terre.
 
  
=== Différences entre les réacteurs conventionnels et Tchernobyl ===
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=== Accidents passés : bilan et leçons ===
[[Image:Thermal_reactor_diagram.png|thumb|Fonctionnement d'un réacteur nucléaire conventionnel (et non pas un surgénérateur)]]
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{{loupe|Accidents nucléaires}}
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A part de l'étude de la liste des accidents graves liés à l'énergie nucléaire civile, on peut tenter d'évaluer le risque posé par ceux-ci. Il ressort que seuls deux accidents à ce jour eurent des effets majeurs sur l'environnement et les populations : des centaines de morts, des dizaines de milliers de cancers développés dans les années ou décennies qui suivirent, peut-être des milliers de malformations infantiles, et des centaines de km² interdits pour longtemps. Ce bilan est également comparable à celui d'une autre catastrophe industrielle : Bhopal.
  
Pour qu'un réacteur nucléaire soit fiable, il doit être conçu de façon à ce que la réaction de fission ne puisse se produire que lorsque les systèmes sont actifs et générer lui-même, naturellement, les conditions qui le pousseront à s'arrêter en cas de problème. Autrement dit il doit présenter des rétro-actions négatives.
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Remarquons aussi que trois de ces quatre accidents furent causés par de graves erreurs de conception et témoignent de l'amateurisme des débuts du nucléaire. Les erreurs qui ont causé ces problèmes ont depuis été corrigées (certaines l'étaient déjà ou avaient été évitées dans d'autres pays avant qu'elles ne se produisent) et chaque accident a permis d'améliorer les procédures de sécurité, la conception des installations et la façon de minimiser les erreurs humaines, considérées comme inévitables. Bien entendu, rien ne dit que toutes les erreurs de conception possibles ont été éliminées, ni que de nouvelles n'ont pas été introduites depuis.
  
Par exemple, dans les réacteurs conventionnels, l'eau agit à la fois comme modérateur (la couche qui ralentit les neutrons) et fluide caloporteur (chargé de refroidir le réacteur). Si la réaction s'accroît, l'eau chauffe (caloporteur) et sa densité diminue. Puisque l'eau est aussi le modérateur, les neutrons ne sont plus ralentis et arrivent trop vite pour provoquer d'autres fissions : ils s'échappent alors vers les couches de confinement et la réaction tend à s'éteindre. On parle pour de tels réacteurs de coefficient de vide négatifs.
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Par ailleurs, les deux accidents les plus graves se sont produits sous l'ère soviétique, ce qui n'est pas anodin : les responsables étaient souvent incompétents (nommés du fait de leur fidélité). Par ailleurs ils étaient soumis à une forte pression et promus en fonction des résultats de productivité, récompensant ceux qui ignoraient les procédures de sécurité. Malheureusement, on ne peut que faire le parallèle avec les méthodes modernes de gestion, en particulier dans le secteur privé mais pas exclusivement. Faut-il considérer que la privatisation des entreprises gérant le nucléaire, ou leur mise en concurrence avec des acteurs privés, est une grave prise de risque, sachant que même lorsque l'État reste majoritaire l'ouverture du capital conduit systématiquement à des changements de méthode de gestion, afin de satisfaire les actionnaires et leur fournir rapidement les dividendes attendus, et une croissance rapide et soutenue ?
  
Le réacteur de Tchernobyl, en revanche, présentait un coefficient de vide positif : il n'existait pas de système d'auto-régulation. Au contraire, il s'y trouvaient des rétro-actions positives : plus la réaction s'intensifiait, plus elle se stimulait ! Voilà pourquoi, en 3 à 5s, la réaction a pu s'emballer et être multipliée par cent. Le réacteur resta par la suite quinze jours en activité. Il est interdit aux États-Unis de construire des réacteurs à coefficient de vide positif.
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=== Risques d'accidents futurs et gravité potentielle ===
  
=== Accidents graves liés à l'énergie nucléaire civile selon l'échelle INES ===
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Afin d'évaluer les conséquences d'un accident moderne, il faudrait regarder quelles quantités de matières radioactives seraient éjectées et leur nature (demi-vie, influence sur l'organisme, etc). Pour les centrales modernes, leur puissance est légèrement supérieure à celle de Tchernobyl mais elles utilisent moins de combustible pour une même quantité d'énergie produite. En revanche, pour les usines de retraitement de la Hague et de Marcoule, qui stockent des décennies de déchets à haute activité des centrales françaises, il existe un risque extrême. Certes, Areva argue de la très haute sécurité du site et du conditionnement des déchets, capables de faire face à la chute d'un avion de ligne.<ref>[http://areva.com/FR/actualites-5379/le-point-sur-la-surete-de-l-usine-de-la-hague-face-au-risque-de-chute-d-avion.html Communiqué] d'Areva sur la sûreté de l'usine de la Hague face au risque de chute d'avion.</ref> Mais quand bien même... Un accident indéterminé pourrait après tout provoquer la volatilisation et la dispersion des déchets à haute activité aujourd'hui vitrifiés, ce qui causerait une catastrophe incomparablement plus grande que Tchernobyl au vu des quantités entreposées. Et toutes les mesures de sécurité ne garantissent pas que cela ne surviendra jamais, aucune loi physique ne l'empêche. C'est là un mode gestion peu prudent, il conviendrait plutôt de limiter les conséquences possibles de toute forme d'événement.
  
La liste suivante est exhaustive. A ce jour on peut donc considérer que seuls deux accident liés au nucléaire civil eurent des effets majeurs sur l'environnement et les populations. D'autres accidents comparables à ceux de niveau 5 se sont produits dans le domaine militaire (accident de Béryl, explosion d'un sous-marin nucléaire soviétique) et un autre dans le domaine civil (expédition erroné vers la casse d'un équipement médical au Brésil en 1987 avec 600 personnes gravement atteintes). Deux choses sont à noter.
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Enfin, il existe des risques toxiques autres que la radioactivité : le plutonium en lui-même est un poison très puissant, quelques microgrammes suffisant à tuer un homme. Or, la France en produit en quantité et la Hague en stocke plus de 50 tonnes. Qui plus est, des controverses se tiennent autour des rejets radioactifs et chimiques pratiqués dans le cadre normal, non-accidentel, d'exploitation. Voir à ce sujet le chapitre [[#Environnement]].
  
Trois de ces quatre accidents furent causés par de graves erreurs de conception et témoignent de l'amateurisme des débuts du nucléaire. Les erreurs qui ont causé ces problèmes ont depuis été corrigées (certaines l'étaient déjà ou avaient été évitées dans d'autres pays avant qu'elles ne se produisent) et chaque accident a permis d'améliorer les procédures de sécurité, la conception des installations et la façon de minimiser les erreurs humaines, considérées comme inévitables. Bien entendu, rien ne dit que toutes les erreurs de conception possibles ont été éliminées, ni que de nouvelles n'ont pas été introduites depuis.
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== Environnement ==
  
Par ailleurs, les deux accidents les plus graves se sont produits sous l'ère soviétique, ce qui n'est pas anodin : les responsables étaient souvent incompétents (nommés du fait de leur fidélité au parti sans forcément avoir les connaissances nécessaires). Par ailleurs, ces responsables étaient soumis à une forte pression et promus en fonction des résultats de productivité, ce qui récompensait ceux qui tendaient à se passer des procédures de sécurité. Malheureusement, on ne peut que faire le parallèle avec les méthodes gestion moderne, en particulier dans le secteur privé mais pas exclusivement. Faut-il considérer que la privatisation des entreprises gérant le nucléaire est une grave prise de risque, sachant que même lorsque l'État reste majoritaire, l'ouverture du capitale conduit systématiquement à des changements de méthode de gestion destinés à satisfaire les actionnaires et leur fournir rapidement les dividendes attendus et une croissance rapide et soutenue ?
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=== Émissions de gaz à effet de serre ===
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L'énergie nucléaire se distingue par ses très faibles émissions en {{CO2}}, probablement les plus faibles par unité d'énergie produite, bien plus faibles que celles des énergies fossiles ou du solaire photovoltaïque.<ref>[http://www.planetoscope.com/nucleaire/884-Kilos-d-uranium-consommes-par-les-centrales-nucleaires.html Statistiques sur l'uranium consommés par les centrales nucléaires]</ref> A tel point que tout changement important de stratégie énergétique se traduirait par des hausses des émissions, sans doute au point de rendre les engagements internationaux de la France en matière de réduction des émissions de {{CO2}} inatteignables. En effet, le nucléaire a permis à la France d'avoir aujourd'hui des émissions de {{CO2}} par habitant très basses, loin derrière des pays pourtant plus "verts" dans leur quotidien et promoteurs des énergies éolienne et photovoltaïque (France : 6,2 t/hab ; Allemagne : 9,8 t/hab ; Norvège : 12,2 t/hab ; États-Unis : 20,1 t/hab).<ref>[http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_%C3%A9missions_de_dioxyde_de_carbone_par_habitant Wikipedia - Liste des pays par émissions de dioxyde de carbone par habitant]</ref>
  
Enfin, pour évaluer les conséquences d'un accident moderne, il faudrait regarder quelles quantités de matières radioactives seraient éjectées et leur nature (demi-vie, influence sur l'organisme, etc). Pour les centrales, leur puissance est légèrement supérieur à celle de Tchernobyl mais utilisent moins de combustible pour une même quantité d'énergie produite. Mais il faudrait aussi considérer les sites de déchets et usines de retraitement.
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=== Déchets ===
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{{loupe|Déchets nucléaires}}
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La gestion des déchets nucléaires est sans doute le problème le plus crucial de l'énergie nucléaire civile. Voici leur catégories et le montant de la production française :
  
==== Niveau 7 ====
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* '''Déchets à haute et moyenne activité à vie longue''' : moins de deux tonnes par an. Ce sont les matériaux issus du cœur du réacteur. Il s'agit de déchets très dangereux dont la durée de vie est de plusieurs centaines de milliers d'années, voire millions d'années. Ils bénéficient d'un conditionnement très particulier (vitrification pour les plus dangereux) mais sont pour l'heure entreposés sur les sites de la Hague et de Marcoul en du choix d'un site de stockage en couche géologique profonde. Ce stockage temporaire pose des problèmes de sécurité puisque leur potentiel de nocivité est immense, bien supérieur aux dégâts produits par Tchernobyl.
* Catastrophe de Tchernobyl : Ukraine, 1986. Suite à un grave vice de conception et une gestion calamiteuse du site, le réacteur s'emballe et une explosion non-nucléaire survient. Selon l'AIEA<ref>[http://www.iaea.org/Publications/Booklets/Chernobyl/chernobyl.pdf AIEA - Chernobyl's legacy]</ref> 1000 personnes furent gravement exposées dont 134 irradiations aiguës et 28 décès, et 600.000 personnes furent affectées d'une surmortalité de 5% via des cancers développés ultérieurement. D'autres estimations estiment que plusieurs dizaines de milliers de cancers ont été ou seront développés du fait de cette catastrophe et imputent également à l'accident une dizaine de milliers de malformations infantiles à travers l'Europe. 488km² demeurent interdits d'accès.
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* '''Déchets à faible activité à vie courte''' : plusieurs tonnes par an, concentrant 99% de la radioactivité des déchets produits. Il s'agit d'outils utilisés dans l'exploitation du nucléaire (gants, etc). Ces déchets font l'objet d'un conditionnement simple mais diversifié selon les matériaux : soit coulés dans des matrices (de bitume, résine, ciment, etc) soit simplement stockés dans des futs de même matière. Ils sont stockés sur les sites de la Manche et de l'Aube, soit enfouis sous des tumulus de terre, soit scellés dans des casemates remplies de béton.
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* '''Déchets à très faible activité''' : des dizaines de tonnes par an. Il s'agit de déchets n'ayant pas d'activité radioactive mais ayant été utilisés dans l'industrie nucléaire. Il peut par exemple s'agir des débris de centrales démantelées. Leur traitement spécifique était une exception française, ils vont désormais être traités comme des déchets conventionnels et généralement recycles pour être utilisés dans les industries conventionnelles.
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* '''Déchets issus de l'activité minière''' : des centaines de milliers de tonnes de matériaux par an (roches, terre, etc), qui sont de faible activité à vie longue (FAVL). Ils ont été produits et stockés dans les pays producteurs (Niger, Canada, Australie, etc) mais aussi en France par le passé. Ces déchets sont comparables avec ceux d'autres activités minières (les quantités générées pour les besoins des centrales au [[charbon]] sont même bien plus importantes par kWh produit par exemple) même si la radioactivité y est plus prononcée.
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* '''Déchets issus de la préparation du combustible''' : des dizaines de milliers de tonnes par an de boues FAVL contenant de l'uranium.<ref>[http://www.languedoc-roussillon.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Compte_Rendu_10_cle22ab28.pdf Compte-rendu de la réunion du CLIC Narbonne-Malvesi]</ref> Beaucoup de ces déchets sont entreposés dans d'anciennes mines françaises ou éparpillés sur de nombreux sites en France.
  
==== Niveau 6 ====
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=== Autres pollutions ===
* Explosion du complexe de Mayak : URSS, 1957. Suite à un mauvais conditionnement et une panne du système de refroidissement, doublé d'une gestion incroyablement irresponsable, des déchets entreposés dans cette usine de retraitement émettent des gaz qui réagissent et provoquent une explosion chimique, projetant à plus d'un kilomètre d'altitude des matières radioactives. De source officielle<ref>[http://atomicsarchives.chez.com/kychtym.html Atomic Archives - Enfin une demi-vérité sur l'autre Tchernobyl]</ref>, plus de 3000 personnes présentèrent une contamination à des niveaux dangereux et 10.000 furent évacuées, la zone étant peu peuplée. Plusieurs dizaines de kilomètres carrés présentent aujourd'hui une contamination comparable à celle de la zone interdite de Tchernobyl.
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[[Image:Cominak.png|thumb|Stockage à ciel ouvert de déchets à faible activité sur le site de Cominak]]
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* L'usine de la Hague opère, dans son fonctionnement normal, des rejets radioactifs, pour 36.000 sieverts par an. Ceux-ci sont versés en mer, au large et en profondeur, dans les lieux de forts courant marins (ce qui motiva le choix de cet emplacement) afin de procéder à une dilution, ce qui a en principe un impact nul sur l'environnement. Cela dit, au lieu même des rejets sous-marin et au-dessus des cheminées de l'usine, la radioactivité est importante même s'il ne semble pas y avoir de conséquences pour les populations voisines. En revanche, on estime que les divers rejets accidentels qui se sont produits à la Hague seraient responsables d'un surcroît de 36% de leucémies autour du site. Enfin,les pêcheurs présentaient une irradiation moyenne 3,5 fois supérieure à l'irradiation naturelle, même si les connaissances sur la [[radioactivité]] laissent penser que ce serait sans conséquence sanitaire.<ref>[http://nucleaire-nonmerci.net/STOA.pdf Rapport final de WISE Paris pour le panel STOA] - Effets toxiques éventuels engendrés par les usines de retraitement nucléaire à Sellafield et au cap de la Hague.</ref>
  
==== Niveau 5 ====
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* Les réacteurs en eux-même n'opèrent pas de rejets radioactifs dans l'environnement : le voisinage d'une centrale présente une radioactivité normale, naturelle. Des incidents se produisent certes régulièrement (quelques dizaines par an en France) mais très peu conduisent à des rejets extérieurs et il est encore plus rare que ces rejets soient préoccupants pour la santé des populations proches ou la sécurité du site. Ces incidents sont signalés à l'ASN (autorité de sûreté nucléaire) et rendus publics, et sont régulièrement publiés dans les médias. En tout état de cause, ils ne semblent pas plus graves que les incidents qui se produisent dans d'autres industries. Toutefois, un surcroît de cas de légionellose a été détecté autour de certaines centrales nucléaires.<ref>[http://www.asn.fr/index.php/S-informer/Actualites/2006/Renforcement-de-la-prevention-de-la-legionellose-autour-des-centrales-nucleaires Autorité de Sûreté Nucléaire] - Renforcement de la prévention de la légionellose autour des centrales nucléaires.</ref> Le seuil exact de contamination étant mal connu, EDF bénéficie de dérogations qui lui accordent des latitudes sur les concentrations de légionelles.
* Three Mile Island : USA, 1979. Suite à des erreurs techniques et humaines, le cœur de cette centrale entre en fusion partielle. Le bouclier de confinement tint bon et il n'y eut pas de rejet des matériaux du cœur à l'extérieur, seule l'eau irradiée du circuit de refroidissement s'échappa. Aucun mort, irradiation a priori insignifiante mais l'on observa une baisse de la natalité humaine et animale par la suite. Cependant, le cœur venait d'être remis en service, ce qui a joué favorablement : avec une irradiation normale, l'activité du cœur aurait été plus grande.
 
* Wind Scale : Grande Bretagne, 1957. Suite à des défauts de conception (le réacteur fut initialement construit à la hâte pour le programme d'armement nucléaire britannique et reconverti par la suite), le réacteur finit par prendre feu. En l'absence de procédures établies, pendant 24h de l'eau fut envoyée sur le réacteur et se dispersa dans l'environnement, charriant avec elle des quantités de radioactivité un million de fois plus faibles que celles de Tchernobyl. Des mesures de précaution furent prises mais il est impossible d'évaluer s'il y eut des conséquences sanitaires.
 
  
== Gestion des déchets ==
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* Comme toute industrie, celle-ci recourt massivement aux produits chimiques, notamment dans les sites en amont et en aval des réacteurs dans le processus industriel : acide nitrique (retraitement des déchets), acide fluorhydrique (concentration du combustible), etc. Et, bien sûr, elle produit également divers composés nocifs, tel que l'oxyde d'uranium. Ces produits ne sont pas relâchés de façon sauvage, ils font l'objet d'un retraitement et sont soumis à des normes. Mais, malgré le respect des normes, diverses pollutions sont générées, telle que l'eutrophisation à l'azote de l'étang de Bages-Sigean. Par ailleurs, des incidents sont inévitables et causent régulièrement des pollutions chimiques locales.<ref>[http://www.sortirdunucleaire.org/actualites/communiques/affiche.php?aff=486 Communiqué] du [[Réseau Sortir du nucléaire]] - Le nucléaire, une énergie propre ?</ref> Là aussi, ces incidents sont signalés en France à l'ASN qui les rend publics.
  
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* La Commission de Recherche et d'Information Indépendantes sur la Radioactivité (Criirad, organisation non-gouvernementale) a établi de nombreux documents<ref>[http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=5476 Article] de la Crirad sur les conditions d'exploitation des mines d'uranium par les filliales d'AREVA et les normes ISO</ref><ref>[http://www.criirad.org/actualites/dossiers2005/niger/somniger.html Page] de la collaboration 2010 Greenpeace/Criirad sur l'exploitation de l'uranium au Niger</ref><ref>[http://www.criirad.org/actualites/dossiers2005/niger/notecriiradarlit.pdf Bilan des analyses 2004-2005] sur l'impact de l'exploitation de l'uranium sur les filliales d'Areva-Cogema au Niger</ref> sur l'exploitation des mines au Niger et ailleurs. Il en ressort plusieurs problèmes de contaminations environnementales au-dessus des normes légales (la plupart sans doute inoffensives mais d'autres plusieurs dizaines de fois au-dessus des seuils) affectant les habitats civils dans le voisinage des mines, ainsi qu'un laxisme certain dans la gestion des déchets radioactifs, comme le stockage définitif à ciel ouvert sur le site de Cominak. Elle note aussi l'exploitation en plein désert des eaux de la nappe fossile (''i.e.'' non-renouvelable) de Tarat, 275 millions de mètres cubes ayant été pompés jusqu'à aujourd'hui, dont 40% pour les installation industrielles.
  
 
== Approvisionnement en combustible ==
 
== Approvisionnement en combustible ==
  
Comme pour les centrales fossiles, les stocks d'uranium sont malheureusement limités. Les réserves accessibles avec un coût inférieur à 130$ par kilo sont aujourd'hui de 60 années<ref>[http://www.sfen.org/fr/question/uranium.htm SFEN]</ref> en se basant sur la consommation actuelle. Or, cette consommation augmentera à l'avenir même si les réacteurs deviennent plus efficaces (l'EPR revendique un usage du combustible 22% plus efficace que l'ancienne génération de centrales). Cependant, on estime que le fonctionnement de la prochaine génération de centrales nucléaires serait au moins assuré.
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Comme pour les centrales fossiles, les stocks d'uranium sont limités. Les réserves accessibles avec un coût inférieur à 130$ par kilo sont aujourd'hui de 60 années<ref>[http://www.sfen.org/fr/question/uranium.htm SFEN]</ref> en se basant sur la consommation actuelle. Or, cette consommation augmentera à l'avenir même si les réacteurs deviennent plus efficaces (l'EPR revendique un usage du combustible 22% plus efficace que l'ancienne génération de centrales). Cependant, on estime que le fonctionnement de la prochaine génération de centrales nucléaires serait au moins assuré.
  
 
L'uranium est extrait sur quatre continents. Les six premiers pays producteurs sont le Canada (30% du total), l’Australie (21%), le Niger (8%), la Namibie (7.5%), l’Ouzbékistan (6%) et la Russie (6%). Une autre partie de l'approvisionnement provient des stocks militaires surnuméraires (États-Unis et Russie) et du retraitement d'une partie du combustible usé.
 
L'uranium est extrait sur quatre continents. Les six premiers pays producteurs sont le Canada (30% du total), l’Australie (21%), le Niger (8%), la Namibie (7.5%), l’Ouzbékistan (6%) et la Russie (6%). Une autre partie de l'approvisionnement provient des stocks militaires surnuméraires (États-Unis et Russie) et du retraitement d'une partie du combustible usé.
  
Enfin, la France utilise également du combustible MOX, constitué de Plutonium (assez commun) et d'uranium appauvri (un déchet de l'enrichissement de l'uranium, la phase qui permet, à partir de l'uranium  naturellement extrait, de produire l'uranium enrichi utilisée dans les centrales nucléaires conventionnelles). Peu rentable à l'époque, ce choix devrait désormais se développer dans d'autres pays puisqu'il permet de réduire la consommation d'uranium.
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Enfin, la France utilise également du combustible MOX, constitué de plutonium (assez commun) et d'uranium appauvri (un déchet de l'enrichissement de l'uranium, la phase qui permet, à partir de l'uranium  naturellement extrait, de produire l'uranium enrichi utilisée dans les centrales nucléaires conventionnelles). Peu rentable à l'époque, ce choix devrait désormais être fait par d'autres pays.
  
 
=== Surgénérateurs ===
 
=== Surgénérateurs ===
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À long terme, il existerait un moyen de prolonger l'exploitation du nucléaire, en consommant 50 à 100 fois moins d'uranium pour produire les mêmes quantités d'énergie : la surgénération (réacteurs à neutrons rapides, ''fast breeders''). Ce sujet est, une fois encore, source de nombreuses controverses.
  
A long terme, il existerait un moyen de prolonger l'exploitation du nucléaire, en consommant 50 à 100 fois moins d'uranium pour produire les mêmes quantités d'énergie, la surgénération (réacteurs à neutrons rapides, ''fast breeders''). Ce sujet est, une fois encore, source de nombreuses controverses.
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Un surgénérateur est un réacteur nucléaire qui crée plus de noyaux fissiles (noyaux pouvant être scindé en noyaux plus petits selon le principe de la fission nucléaire) qu'il n'en consomme. Cela est possible en transmutant des noyaux fertiles (des noyaux non-fissiles, tels que l'uranium appauvri ou le thorium, et disponibles en grandes quantités) en noyaux fissiles (plutonium par exemple). Le réacteur ne crée évidemment pas de la matière à partir de rien, disons simplement qu'il suffit de lui fournir des éléments plutôt communs qu'il transmutera en combustible et brûlera. Économiquement cela semble attirant mais, en pratique, de nombreuses difficultés techniques font que ce type de réacteur n'est intéressant qu'à partir d'un certain prix de l'uranium. Évidemment, cette technologie prendra plus de valeur à l'avenir. Qui plus est, elle permettrait la transmutation de déchets hautement actifs en combustibles.
 
 
Un surgénérateur est un réacteur nucléaire qui crée plus de noyaux fissiles (noyaux de combustible pouvant être scindé en noyaux plus petits selon le principe de la fission nucléaire) qu'il n'en consomme. Cela est possible en transmutant des noyaux fertiles (qui sont des noyaux non-fissiles, tels que l'uranium appauvri ou le thorium, disponibles en grandes quantités) en noyaux fissiles (plutonium par exemple). Le réacteur ne crée évidemment pas de la matière à partir de rien, disons simplement qu'il suffit de lui fournir des éléments plutôt communs qu'il transmutera en combustible et brûlera. Économiquement cela semble attirant mais, en pratique, de nombreuses difficultés techniques font que ce type de réacteur n'est intéressant qu'à partir d'un certain prix de l'uranium. Évidemment, cette technologie prend toute sa valeur dans un scénario de pénurie d'uranium.
 
 
 
Mais ces surgénérateurs ont un défaut rédhibitoire : ils sont dangereux ! Tchernobyl n'était pas un surgénérateur mais, comme lui, ces réacteurs présentent des rétro-actions positives qui poussent le réacteur à s'emballer. Il faut des contrôles actifs (qui peuvent échouer) pour contrôler le réacteur et le maintenir à son niveau de réaction, et prévenir l'emballement. Même s'il est vrai que le réacteur de Tchernobyl présentait d'autres problèmes de conception et de gestion et que les surgénérateurs modernes s'emballeraient moins vite, c'est un risque bien supérieur à celui des réacteurs conventionnels.
 
 
 
Enfin, notons que les surgénérateurs ont connu des destins malheureux dans le passé, bien qu'on note un regain d'intérêt récent (en Inde, du fait de la présence importante de Thorium, et aux Etats-Unis avec le projet ''Generation-IV'' pour la prochaine génération de centrales). L'exemple le plus célèbre est français, avec Superphénix. Souvent raillé, ce réacteur a pourtant quelques excuses et aurait pu avoir un avenir différent : sur onze années de fonctionnement, il n'a été exploité que 53 mois. Mais les problèmes techniques initiaux, dû à des erreurs de conceptions et des choix audacieux, n'ont causé que 25 mois d'arrêt. Ce sont avant tout les fermetures administratives (suite à des actions en justice, des interventions parlementaires, la nécessité d'examens, etc) qui ont représenté 54 mois de fermeture. La dernière année, ce réacteur fonctionna mieux que la moyenne des centrales conventionnelles. Des débats subsistent sur les raisons de sa fermeture par Lionel Jospin en 1997 : pour les uns, cela était dû à un manque d'intérêt économique alors que les prix de l'uranium étaient bas. Pour d'autres, il s'agissait d'une concession faîte au parti des Verts, alors membre important de la "gauche plurielle".
 
 
 
 
 
'''Les paragraphes suivants vont être remaniés'''
 
 
 
== Pollution et dangers ==
 
Certaines personnes prétendent que l'énergie nucléaire est "propre", car elle rejette moins de dioxyde de carbone (et donc, contribue plus faiblement au réchauffement climatique) que la plupart des autres sources d'énergie <ref>[http://www.planetoscope.com/nucleaire/884-Kilos-d-uranium-consommes-par-les-centrales-nucleaires.html Statistiques sur l'uranium consommés par les centrales nucléaires]</ref>. Mais les opposants à l'atome rappellent les nombreuses pollutions de l'industrie nucléaire <ref>[http://www.sortirdunucleaire.org/actualites/communiques/affiche.php?aff=486 Le nucléaire, une énergie "propre" ?] - Communiqué du Réseau Sortir du Nucléaire</ref> qui ne peut donc en aucun cas être prétendue comme "propre".
 
 
 
La fusion nucléaire est l'objet de recherches depuis plus de 50 ans, mais l'objectif semble s'éloigner au fur et à mesure que les recherches progressent <ref>[http://reacteur.iter.free.fr/la-rech.htm  Le coût d'ITER pourrait flamber] - La Recherche n°422 - septembre 2008</ref>. Qui plus est, elle est aussi porteuse de dangers comme le dénoncent des scientifiques dont deux prix Nobel de physique, le japonais Koshiba et le français Pierre-Gilles de Gennes <ref>[http://reacteur.iter.free.fr/de-gennes.htm Recherche : le cri d'alarme d'un prix Nobel] - Les Echos - Jeudi 12 janvier 2006</ref>.
 
 
 
== Déchets ==
 
Selon l'IAEA, environ {{formatnum:200000}} m3 de déchets faiblement radioactifs et {{formatnum:10000}} m3 de déchets hautement radioactifs sont produits à l'échelle mondiale chaque année<ref>[http://www.iaea.org/Publications/Factsheets/English/manradwa.html Managing Radioactive Waste] - International Atomic Energy Agency (IAEA)</ref>. Les déchets hautement radioactifs sont extrêmement concentrés et toxiques. Si un stock d'une tonne se mettait à fuir après 1000 ans, il contiendrait encore assez de radioactivité pour contaminer 100 km3 d'eau<ref>{{pdf}}[http://www.greenpeace.org/raw/content/belgium/fr/press/reports/fichenucleaire4.pdf Les déchets radioactifs] - Greenpeace Belgique</ref>!
 
 
 
À elle seule, la France annonce produire ''"officiellement"'' 1 kg par an par habitant de déchets nucléaires dont 10 g de déchets haute activité (HA)<ref>[http://www.cea.fr/jeunes/themes/les_dechets_radioactifs/le_cycle_du_combustible/les_dechets_nucleaires Les déchets nucléaires] - Commissariat à l'Énergie Atomique (CEA)</ref>, soit 650 tonnes de déchets "haute activité" pour l'ensemble du pays. Toutefois, ce chiffre ne représente que les déchets du processus de fabrication de l'électricité d'origine nucléaire (gants, bottes, outils pour les A et déchets du « combustible » pour les B et C). Afin d'avoir une vision juste de la réalité des déchets, il faut prendre en compte tout le cycle ([[analyse du cycle de vie]]):
 
* Cela commence par la mine d'uranium : 52 millions de tonnes pour les résidus d'extraction (assimilables aux FAVL) pour la France<ref>[http://www.criirad.org/actualites/dossiers%202007/lois%20tsn-abrogation/analizcriirad-dechets-4p.doc Analyse des dispositions de la nouvelle loi n°2006-739 sur la gestion durable des matières et déchets radioactifs] par le CRIIRAD</ref> et seulement pour la période (aujourdhui terminée) où on a exploité dans ce pays (aujourdhui c'est au Niger, Canada, Australie, etc.).
 
* Puis c'est la purification (Malvézy, près de Narbonne) : des immenses bassins de décantation contenant des centaines de milliers de tonnes de déchets.
 
* Puis l'enrichissement qui génére entre autre de l'uranium appauvri (près de {{formatnum:200000}} tonnes à Bessines dans le Limousin)...
 
* Et puis ajouter les rejets directs d'effluents (gazeux et liquide, chimiques et radioactifs) dans l'environnement qui sont bien des déchets non gérés!
 
Ce chiffre (1 kg par an) n'a donc aucune valeur et la réalité est donc toute autre.
 
 
 
En France, le volume de ces déchets dits à "haute activité" était de {{formatnum:2293}} m3 au 31 décembre 2007<ref>[http://www.andra.fr/pages/fr/menu1/les-dechets-radioactifs/comment-sont-classes-les-dechets-radioactifs--/les-dechets-de-haute-activite--ha--65.html Les déchets de haute activité (HA)] - Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra)</ref>, soit l'équivalent du volume d'une piscine olympique.
 
  
La pollution générée est des plus globales, elle affecte tout ce qu'elle touche, l'air, l'eau, la terre et la vie et ces déchets haute activité resteront dangereux durant des centaines de milliers voire des millions d'années (ex. le plutonium-239 reste radioactif pendant au moins {{formatnum:240000}} ans, soit une période aussi longue que celle qui sépare notre ère de celle de l'Homme de Neandertal).
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Mais ces surgénérateurs ont un défaut rédhibitoire : le risque d'emballement. Tchernobyl n'était pas un surgénérateur mais, comme lui, ces réacteurs présentent des rétro-actions positives qui poussent le réacteur à s'emballer. Il faut des contrôles actifs (qui peuvent échouer) pour maintenir le cœur à son niveau de réaction et prévenir l'emballement. D'autant qu'un surgénérateur est exploité en-dessous de son régime maximal. Même s'il est vrai que le réacteur de Tchernobyl présentait d'autres problèmes de conception et de gestion et que les surgénérateurs modernes s'emballeraient moins vite, c'est un risque bien supérieur à celui des réacteurs conventionnels.<ref>[http://www.thebulletin.org/web-edition/features/the-safety-inadequacies-of-indias-fast-breeder-reactor Article de] The Nuclear Bulletin - The safety inadequacies of India's fast breeder reactor</ref>
  
Penser que nous pourrons stocker les déchets nucléaires de manière sûre durant {{formatnum:240000}} années est donc particulièrement naïf. Qui assumera la responsabilité d'un problème que nous imposerons aux {{formatnum:6800}} prochaines générations? Comment installer un système d'alerte qui soit fiable aussi longtemps? Qui assumera les coûts engendrés par la sécurité des sites de stockage?
+
Enfin, ces surgénérateurs ont connu des destins malheureux dans le passé, souvent arrêtés prématurément. L'exemple le plus célèbre est français, avec Superphénix. Souvent raillé, ce réacteur n'a été exploité que 53 mois en onze années. Mais les problèmes techniques initiaux, dû à des erreurs de conceptions et une grande complexité technique, n'ont causé que 25 mois d'arrêt. Ce sont avant tout les fermetures administratives (suite à des actions en justice, des interventions parlementaires, la nécessité d'examens, etc) qui ont représenté 54 mois de fermeture. La dernière année, ce réacteur afficha même un excellent taux de disponibilité. Des débats subsistent sur les raisons de sa fermeture par Lionel Jospin en 1997 : pour les uns, cela était dû à un manque d'intérêt économique alors que les prix de l'uranium étaient bas. Pour d'autres, il s'agissait d'une concession faîte au parti des Verts, alors membre important de la "gauche plurielle". Notons un regain d'intérêt récent pour la surgénération : en Inde, du fait de la présence importante de thorium, et aux Etats-Unis avec le projet ''Generation-IV'' pour la prochaine génération de centrales.
  
Aujourd'hui, il n'existe aucune solution pour éliminer les déchets de la fission nucléaire: les options d'échelle industrielle ne sont encore que temporaires, et les solutions définitives ne sont encore qu'expérimentales et extrêmement controversées, comme l'enfouissement, considéré comme un crime par les opposants, et rejeté par les populations concernées <ref>[http://www.liberation.fr/economie/0101584653-l-enfouissement-enterre-a-auxon L'enfouissement enterré à Auxon] - Liberation.fr</ref>.
+
== Perspectives futures ==
  
== Avenir ==
+
La fusion nucléaire est parfois présentée comme le Saint-Graal de l'énergie nucléaire civile : a priori économique (rendement dix fois plus grand que pour la fission), utilisant un combustible disponible à profusion (un milliard d'années de réserve), avec des risques plus faibles de contamination radioactive (combustibles et produits non-radioactifs) et a priori de meilleures conditions de sécurité (contesté par des scientifiques reconnus tels que Pierre-Gilles de Gennes<ref>[http://reacteur.iter.free.fr/de-gennes.htm Recherche : le cri d'alarme d'un prix Nobel] - Les Echos - Jeudi 12 janvier 2006</ref> ou le japonais Koshiba), avec une absence totale de risque d'emballement (dans le cadre des recherches menées, l'un des problèmes est en fait d'empêcher la réaction de s'arrêter d'elle-même).
  
=== Fusion nucléaire civile ===
+
Mais les recherches ont débuté depuis plus de quarante ans. On estimait alors le temps nécessaires à quatre décennies et, aujourd'hui, on en donne toujours la même estimation. Qui plus est, les coûts de recherche sont estimés en milliards d'euros et ne cessent d'augmenter.<ref>[http://reacteur.iter.free.fr/la-rech.htm  Le coût d'ITER pourrait flamber] - La Recherche n°422 - septembre 2008</ref> Le défi est en effet important  puisqu'il faut projeter les noyaux atomiques l'un contre l'autre à des vitesses extraordinaires (des centaines de millions de degrés) en luttant contre leur répulsion naturelle, le plasma étant comprimé au moyen de champs magnétiques très intenses et de lasers. Des progrès ont toutefois été accomplis durant cette période puisqu'on parvient désormais à maintenir la réaction pendant plus d'une minute tout en produisant plus d'énergie que l'on en consomme.
  
 +
La fusion nucléaire est l'objet de plusieurs expériences colossales, telles que le projet international ITER (à Cadarache) ou le laser français Mégajoule, ainsi qu'aux États-Unis ou au Japon.
  
 
== Voir aussi ==
 
== Voir aussi ==
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===Liens internes===
 
===Liens internes===
 
* [[Énergies renouvelables]]
 
* [[Énergies renouvelables]]
* l'[[énergie éolienne]] (le vent)
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* [[Limites des énergies renouvelables]]
* l'[[énergie des vagues]] et de la houle
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* [[Propositions énergétiques pour la France]]
* l'[[énergie marémotrice]] (les marées)
 
* l'[[énergie thermique des mers]]
 
* l'[[énergie hydraulique]] (énergie gravitationnelle de l'eau)
 
* l'[[énergie de la biomasse]] (bois, sucre, etc.)
 
* l'[[énergie solaire]] (photovoltaïque, ainsi que chaleur)
 
* l'[[énergie géothermique]] (chaleur du sous-sol)
 
* [[Déchets - le cauchemar du nucléaire]] (film documentaire)
 
 
* [[Réseau Sortir du nucléaire]]
 
* [[Réseau Sortir du nucléaire]]
 +
* [[Accidents nucléaires]]
 +
* [[Déchets nucléaires]]
 +
* [[Radioactivité]]
  
 
===Liens externes===
 
===Liens externes===
* [http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_accidents_nucl%C3%A9aires Wikipedia: Liste des accidents nucléaires]
 
 
* http://www.sortirdunucleaire.org
 
* http://www.sortirdunucleaire.org
 
* [http://futura24.site.voila.fr/nucle/nucle.htm Un dossier diversifié sur l'énergie nucléaire]
 
* [http://futura24.site.voila.fr/nucle/nucle.htm Un dossier diversifié sur l'énergie nucléaire]
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L'énergie nucléaire désigne l'énergie libérée par la fission ou la fusion des noyaux des atomes.

Cet article traite essentiellement de son usage civil pour la production d'électricité.

Introduction[modifier]

Découverte dans les années 1930, la fission nucléaire est utilisée à des fins civiles et militaires. Elle consiste à scinder un noyau atomique lourd (uranium par exemple) en noyaux plus petits. 1% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé par les centrales nucléaires actuelles et par les premières bombes atomiques.

La fusion nucléaire consiste à fusionner deux petits noyaux en un plus gros (typiquement, deux noyaux d'hydrogène fusionnant en un noyau d'hélium). 10% de la masse est perdue au passage et convertie en énergie. C'est le principe utilisé actuellement par les bombes à hydrogène. D'éventuels usages civils sont théoriquement prometteurs (hydrogène et deutérium se trouvent aisément et l'hélium produit ne serait pas radioactif) mais les recherches menées depuis 40 ans n'ont toujours pas abouties.

Place de l'énergie nucléaire[modifier]

Vista-xmag.png Consulter aussi l’article :   Limites des énergies renouvelables.

Aujourd'hui, l'énergie nucléaire représente 75% de la production électrique française mais seulement 9.5% de la production électrique mondiale. Les énergies renouvelables produisent beaucoup plus, leur part (en augmentation continue) a dépassé 20% de la production mondiale (cf Key worl energy statistics, AIE), dont 17% d'hydroélectricité. Les renouvelables constituent donc la principale alternative aux énergies fossiles.

De plus, la puissance d'une centrale nucléaire ne peut pas être rapidement ajustée, il faut environ une heure pour arriver à pleine puissance en partant d'une centrale nucléaire au repos. Au mieux, elle ne peut donc fournir que le gros de la production. Les variations rapides de la consommation (ou de la production des renouvelables : baisse du vent ou de la luminosité) peuvent toujours être compensées par exemple par l'hydroélectricité.

Enfin, le nucléaire ne peut prétendre à se substituer largement dans le monde aux énergies fossiles : les stocks disponibles de combustible seraient trop faibles et tous les pays ne disposent pas des compétences et de la stabilité nécessaires.[1]

Alternatives pour la France[modifier]

Vista-xmag.png Consulter aussi l’article :   Propositions énergétiques pour la France.
Centrales nucléaires entre Beijing et Tianjin (Chine)

L'alternative la plus simple serait de faire ce qu'on l'on fait dans la plupart des pays développés (hormis ceux ayant un potentiel hydroélectrique exceptionnel, comme le Brésil) : utiliser principalement les énergies fossiles, notamment le charbon, pour un coût de l'électricité globalement similaire et des émissions de gaz à effet de serre fortement accrues. Mais serait-il possible de miser avant tout sur les énergies renouvelables ?

Coûts financiers[modifier]

Aujourd'hui, la France dispose d'un tarif électrique dans la moyenne européenne[2] et indépendant des cours des énergies fossiles qui augmenteront sur le long terme. Mais la question du coût réel et futur de l'énergie nucléaire fait l'objet d'une controverse. Les raisons en sont les suivantes :

  • Les premiers investissements dans le nucléaire civil furent réalisés par l'État français et non par EDF, le budget de cette entreprise ne fut donc pas grévé par les emprunts correspondants. Or, la France va devoir renouveler son parc si elle maintient son choix nucléaire. En France, ce coût serait estimé à 345 milliards d'euros[3] (plutôt 500 milliards en fait : ces chiffres étaient basés sur l'expérience anglaise alors que la France miserait sur l'EPR, plus coûteux au départ). La somme semble gigantesque mais il faut relativiser : sur 40 ans et en conservant la production actuelle de 400 TWh, cela représenterait 2 centimes par kWh.
  • Un autre facteur est le coût de la matière première. En réponse aux tendances inflationnistes sur le long terme des énergies fossiles, l'énergie nucléaire connaît un nouvel essor mondial, ce qui exerce une pression sur les prix des combustibles. Cela dit, le coût de ces matières premières ne représente aujourd'hui que 12% du coût de production.[4] et l'EPR devrait consommer moins de combustible (22% de gain d'efficacité annoncés). Même si ce coût venait à doubler, le prix final n'en serait que peu affecté.
  • Le coût du démantèlement est également souvent évoqué comme une autre source d'énigme. Initialement grandement sous-estimé, les expériences se sont multipliées ces dernières années, en France et à l'étranger, et on commence à en avoir une meilleure idée. Celui-ci serait en fait supérieur à dix milliards.[5] Là encore, il n'y pas vraiment de quoi questionner le choix nucléaire.
  • Dans le contexte nucléaire, l'État français a poussé au développement de dispositifs électriques de confort thermique, peu coûteux à l'achat mais ayant un faible rendement énergétique : pour produire une calorie thermique, il a fallu produire plus de deux calories électrique. Qui plus est, durant les pointes hivernales, on fait appel à de l'électricité d'origine fossile (jusqu'à 30%) en partie importée d'Allemagne. Sur le plan des émissions de CO2, l'opération reste légèrement avantageuse mais pas en termes de dépenses pour les usagers.[6]
  • Certains coûts sont externalisés : la pollution environnementale (problème existant aussi pour les centrales fossiles), le coût de la sécurité (prise en charge par l'armée) et surtout les déchets pour lesquels aucune stratégie de long terme n'a été définie et ne font pas l'objet de provisions financières.

Enfin, il faut prendre en compte que puisque la seule alternative au nucléaire ayant des émissions faibles de CO2 est un mélange renouvelables-fossiles, et puisque ces solutions sont elles-mêmes coûteuses (redondance des installations, cours à long terme des combustibles fossiles, coûts élevés des solutions renouvelables), le nucléaire semble bien apparaître comme économiquement pérenne et avantageux.


Sécurité[modifier]

Le court article sur la radioactivité vous éclairera sur ces problèmes et les unités utilisées.

En substance, une installation nucléaire civile présente des risques comparables à d'autres activités industrielles : déflagration et contamination. Mais la nature de la radioactivité place les installations nucléaires parmi les industries les plus dangereuses. Concernant la contamination, nous verrons ce qu'il en est plus tard, en examinant les accidents qui eurent lieu dans le passé.

A propos de déflagrations, on parle de risques d'explosion chimique et non nucléaire : les installations nucléaires conventionnelles (tous les réacteurs français) n'utilisent pas de réactifs susceptibles de causer une explosion nucléaire. En revanche, certains réacteurs militaires ou des réacteurs civils expérimentaux à neutrons rapides (comme le fut Superphénix mais il n'en existe plus en France) peuvent manipuler ce genre de produits. Ça ne signifie pas que le risque soit négligeable : une explosion chimique peut être particulièrement violente, il suffit de se rappeler celle de l'usine AZF de Toulouse. Et, surtout, une telle explosion disperse les produits radioactifs qui sont sur place.

Enfin, notons que même si les accidents sont rendus improbables, ils finiront toujours par arriver sur une période suffisamment longue. La question est donc de savoir si le nucléaire constitue un risque acceptable ou non.

Différences entre les réacteurs conventionnels et Tchernobyl[modifier]

Fichier:Thermal reactor diagram.png

Une condition généralement admise pour qu'un réacteur nucléaire ne puisse s'emballer est qu'il soit conçu de façon à ce que la réaction de fission ne puisse se produire que lorsque les systèmes sont actifs et générer lui-même, naturellement, les conditions qui le pousseront à s'arrêter en cas de problème. Autrement dit il doit présenter des rétro-actions négatives.[7]

Par exemple, dans les réacteurs conventionnels (y compris l'EPR), l'eau agit à la fois comme modérateur (la couche qui ralentit les neutrons) et fluide caloporteur (chargé de refroidir le réacteur). Si la réaction s'accroît, l'eau chauffe (caloporteur) et sa densité diminue. Puisque l'eau est aussi le modérateur, les neutrons ne sont plus ralentis et arrivent trop vite pour provoquer d'autres fissions : ils s'échappent alors vers les couches de confinement et la réaction tend à s'éteindre. On parle pour de tels réacteurs de coefficients de vide négatifs.[8]. Toutefois, on a vu à Fukushima que dans certains cas des conditions persistent qui permettent à la réaction de se dérouler sans toutefois s'emballer.

Le réacteur de Tchernobyl, en revanche, présentait un coefficient de vide positif. Voilà pourquoi, en 3 à 5s, la réaction a pu s'emballer et être multipliée par cent, restant par la suite 15 jours en activité. Tous les réacteurs français ont un coefficient de vide négatif et il est interdit aux États-Unis de construire des réacteurs à coefficient de vide positif. Beaucoup de centrales soviétiques ont encore un coefficient de vide positif mais des aménagements de sécurité ont été ajoutés suite à Tchernobyl. Au Canada, tous les réacteurs CANDU présentent un coefficient de vide positif mais assez faible. Les autorités canadiennes arguent que ce faible coefficient leur laisserait assez de temps avant l'emballement pour prendre les mesures nécessaires, ce qui est vrai tant que les conditions le leur permettent et que les systèmes de secours se comportent normalement (à Tchernobyl, le retrait des barres de combustible fut impossible, les mécanismes ayant été tordus par la chaleur).[9]


Accidents passés : bilan et leçons[modifier]

Vista-xmag.png Consulter aussi l’article :   Accidents nucléaires.

A part de l'étude de la liste des accidents graves liés à l'énergie nucléaire civile, on peut tenter d'évaluer le risque posé par ceux-ci. Il ressort que seuls deux accidents à ce jour eurent des effets majeurs sur l'environnement et les populations : des centaines de morts, des dizaines de milliers de cancers développés dans les années ou décennies qui suivirent, peut-être des milliers de malformations infantiles, et des centaines de km² interdits pour longtemps. Ce bilan est également comparable à celui d'une autre catastrophe industrielle : Bhopal.

Remarquons aussi que trois de ces quatre accidents furent causés par de graves erreurs de conception et témoignent de l'amateurisme des débuts du nucléaire. Les erreurs qui ont causé ces problèmes ont depuis été corrigées (certaines l'étaient déjà ou avaient été évitées dans d'autres pays avant qu'elles ne se produisent) et chaque accident a permis d'améliorer les procédures de sécurité, la conception des installations et la façon de minimiser les erreurs humaines, considérées comme inévitables. Bien entendu, rien ne dit que toutes les erreurs de conception possibles ont été éliminées, ni que de nouvelles n'ont pas été introduites depuis.

Par ailleurs, les deux accidents les plus graves se sont produits sous l'ère soviétique, ce qui n'est pas anodin : les responsables étaient souvent incompétents (nommés du fait de leur fidélité). Par ailleurs ils étaient soumis à une forte pression et promus en fonction des résultats de productivité, récompensant ceux qui ignoraient les procédures de sécurité. Malheureusement, on ne peut que faire le parallèle avec les méthodes modernes de gestion, en particulier dans le secteur privé mais pas exclusivement. Faut-il considérer que la privatisation des entreprises gérant le nucléaire, ou leur mise en concurrence avec des acteurs privés, est une grave prise de risque, sachant que même lorsque l'État reste majoritaire l'ouverture du capital conduit systématiquement à des changements de méthode de gestion, afin de satisfaire les actionnaires et leur fournir rapidement les dividendes attendus, et une croissance rapide et soutenue ?

Risques d'accidents futurs et gravité potentielle[modifier]

Afin d'évaluer les conséquences d'un accident moderne, il faudrait regarder quelles quantités de matières radioactives seraient éjectées et leur nature (demi-vie, influence sur l'organisme, etc). Pour les centrales modernes, leur puissance est légèrement supérieure à celle de Tchernobyl mais elles utilisent moins de combustible pour une même quantité d'énergie produite. En revanche, pour les usines de retraitement de la Hague et de Marcoule, qui stockent des décennies de déchets à haute activité des centrales françaises, il existe un risque extrême. Certes, Areva argue de la très haute sécurité du site et du conditionnement des déchets, capables de faire face à la chute d'un avion de ligne.[10] Mais quand bien même... Un accident indéterminé pourrait après tout provoquer la volatilisation et la dispersion des déchets à haute activité aujourd'hui vitrifiés, ce qui causerait une catastrophe incomparablement plus grande que Tchernobyl au vu des quantités entreposées. Et toutes les mesures de sécurité ne garantissent pas que cela ne surviendra jamais, aucune loi physique ne l'empêche. C'est là un mode gestion peu prudent, il conviendrait plutôt de limiter les conséquences possibles de toute forme d'événement.

Enfin, il existe des risques toxiques autres que la radioactivité : le plutonium en lui-même est un poison très puissant, quelques microgrammes suffisant à tuer un homme. Or, la France en produit en quantité et la Hague en stocke plus de 50 tonnes. Qui plus est, des controverses se tiennent autour des rejets radioactifs et chimiques pratiqués dans le cadre normal, non-accidentel, d'exploitation. Voir à ce sujet le chapitre #Environnement.

Environnement[modifier]

Émissions de gaz à effet de serre[modifier]

L'énergie nucléaire se distingue par ses très faibles émissions en CO2, probablement les plus faibles par unité d'énergie produite, bien plus faibles que celles des énergies fossiles ou du solaire photovoltaïque.[11] A tel point que tout changement important de stratégie énergétique se traduirait par des hausses des émissions, sans doute au point de rendre les engagements internationaux de la France en matière de réduction des émissions de CO2 inatteignables. En effet, le nucléaire a permis à la France d'avoir aujourd'hui des émissions de CO2 par habitant très basses, loin derrière des pays pourtant plus "verts" dans leur quotidien et promoteurs des énergies éolienne et photovoltaïque (France : 6,2 t/hab ; Allemagne : 9,8 t/hab ; Norvège : 12,2 t/hab ; États-Unis : 20,1 t/hab).[12]

Déchets[modifier]

Vista-xmag.png Consulter aussi l’article :   Déchets nucléaires.

La gestion des déchets nucléaires est sans doute le problème le plus crucial de l'énergie nucléaire civile. Voici leur catégories et le montant de la production française :

  • Déchets à haute et moyenne activité à vie longue : moins de deux tonnes par an. Ce sont les matériaux issus du cœur du réacteur. Il s'agit de déchets très dangereux dont la durée de vie est de plusieurs centaines de milliers d'années, voire millions d'années. Ils bénéficient d'un conditionnement très particulier (vitrification pour les plus dangereux) mais sont pour l'heure entreposés sur les sites de la Hague et de Marcoul en du choix d'un site de stockage en couche géologique profonde. Ce stockage temporaire pose des problèmes de sécurité puisque leur potentiel de nocivité est immense, bien supérieur aux dégâts produits par Tchernobyl.
  • Déchets à faible activité à vie courte : plusieurs tonnes par an, concentrant 99% de la radioactivité des déchets produits. Il s'agit d'outils utilisés dans l'exploitation du nucléaire (gants, etc). Ces déchets font l'objet d'un conditionnement simple mais diversifié selon les matériaux : soit coulés dans des matrices (de bitume, résine, ciment, etc) soit simplement stockés dans des futs de même matière. Ils sont stockés sur les sites de la Manche et de l'Aube, soit enfouis sous des tumulus de terre, soit scellés dans des casemates remplies de béton.
  • Déchets à très faible activité : des dizaines de tonnes par an. Il s'agit de déchets n'ayant pas d'activité radioactive mais ayant été utilisés dans l'industrie nucléaire. Il peut par exemple s'agir des débris de centrales démantelées. Leur traitement spécifique était une exception française, ils vont désormais être traités comme des déchets conventionnels et généralement recycles pour être utilisés dans les industries conventionnelles.
  • Déchets issus de l'activité minière : des centaines de milliers de tonnes de matériaux par an (roches, terre, etc), qui sont de faible activité à vie longue (FAVL). Ils ont été produits et stockés dans les pays producteurs (Niger, Canada, Australie, etc) mais aussi en France par le passé. Ces déchets sont comparables avec ceux d'autres activités minières (les quantités générées pour les besoins des centrales au charbon sont même bien plus importantes par kWh produit par exemple) même si la radioactivité y est plus prononcée.
  • Déchets issus de la préparation du combustible : des dizaines de milliers de tonnes par an de boues FAVL contenant de l'uranium.[13] Beaucoup de ces déchets sont entreposés dans d'anciennes mines françaises ou éparpillés sur de nombreux sites en France.

Autres pollutions[modifier]

Fichier:Cominak.png

  • L'usine de la Hague opère, dans son fonctionnement normal, des rejets radioactifs, pour 36.000 sieverts par an. Ceux-ci sont versés en mer, au large et en profondeur, dans les lieux de forts courant marins (ce qui motiva le choix de cet emplacement) afin de procéder à une dilution, ce qui a en principe un impact nul sur l'environnement. Cela dit, au lieu même des rejets sous-marin et au-dessus des cheminées de l'usine, la radioactivité est importante même s'il ne semble pas y avoir de conséquences pour les populations voisines. En revanche, on estime que les divers rejets accidentels qui se sont produits à la Hague seraient responsables d'un surcroît de 36% de leucémies autour du site. Enfin,les pêcheurs présentaient une irradiation moyenne 3,5 fois supérieure à l'irradiation naturelle, même si les connaissances sur la radioactivité laissent penser que ce serait sans conséquence sanitaire.[14]
  • Les réacteurs en eux-même n'opèrent pas de rejets radioactifs dans l'environnement : le voisinage d'une centrale présente une radioactivité normale, naturelle. Des incidents se produisent certes régulièrement (quelques dizaines par an en France) mais très peu conduisent à des rejets extérieurs et il est encore plus rare que ces rejets soient préoccupants pour la santé des populations proches ou la sécurité du site. Ces incidents sont signalés à l'ASN (autorité de sûreté nucléaire) et rendus publics, et sont régulièrement publiés dans les médias. En tout état de cause, ils ne semblent pas plus graves que les incidents qui se produisent dans d'autres industries. Toutefois, un surcroît de cas de légionellose a été détecté autour de certaines centrales nucléaires.[15] Le seuil exact de contamination étant mal connu, EDF bénéficie de dérogations qui lui accordent des latitudes sur les concentrations de légionelles.
  • Comme toute industrie, celle-ci recourt massivement aux produits chimiques, notamment dans les sites en amont et en aval des réacteurs dans le processus industriel : acide nitrique (retraitement des déchets), acide fluorhydrique (concentration du combustible), etc. Et, bien sûr, elle produit également divers composés nocifs, tel que l'oxyde d'uranium. Ces produits ne sont pas relâchés de façon sauvage, ils font l'objet d'un retraitement et sont soumis à des normes. Mais, malgré le respect des normes, diverses pollutions sont générées, telle que l'eutrophisation à l'azote de l'étang de Bages-Sigean. Par ailleurs, des incidents sont inévitables et causent régulièrement des pollutions chimiques locales.[16] Là aussi, ces incidents sont signalés en France à l'ASN qui les rend publics.
  • La Commission de Recherche et d'Information Indépendantes sur la Radioactivité (Criirad, organisation non-gouvernementale) a établi de nombreux documents[17][18][19] sur l'exploitation des mines au Niger et ailleurs. Il en ressort plusieurs problèmes de contaminations environnementales au-dessus des normes légales (la plupart sans doute inoffensives mais d'autres plusieurs dizaines de fois au-dessus des seuils) affectant les habitats civils dans le voisinage des mines, ainsi qu'un laxisme certain dans la gestion des déchets radioactifs, comme le stockage définitif à ciel ouvert sur le site de Cominak. Elle note aussi l'exploitation en plein désert des eaux de la nappe fossile (i.e. non-renouvelable) de Tarat, 275 millions de mètres cubes ayant été pompés jusqu'à aujourd'hui, dont 40% pour les installation industrielles.

Approvisionnement en combustible[modifier]

Comme pour les centrales fossiles, les stocks d'uranium sont limités. Les réserves accessibles avec un coût inférieur à 130$ par kilo sont aujourd'hui de 60 années[20] en se basant sur la consommation actuelle. Or, cette consommation augmentera à l'avenir même si les réacteurs deviennent plus efficaces (l'EPR revendique un usage du combustible 22% plus efficace que l'ancienne génération de centrales). Cependant, on estime que le fonctionnement de la prochaine génération de centrales nucléaires serait au moins assuré.

L'uranium est extrait sur quatre continents. Les six premiers pays producteurs sont le Canada (30% du total), l’Australie (21%), le Niger (8%), la Namibie (7.5%), l’Ouzbékistan (6%) et la Russie (6%). Une autre partie de l'approvisionnement provient des stocks militaires surnuméraires (États-Unis et Russie) et du retraitement d'une partie du combustible usé.

Enfin, la France utilise également du combustible MOX, constitué de plutonium (assez commun) et d'uranium appauvri (un déchet de l'enrichissement de l'uranium, la phase qui permet, à partir de l'uranium naturellement extrait, de produire l'uranium enrichi utilisée dans les centrales nucléaires conventionnelles). Peu rentable à l'époque, ce choix devrait désormais être fait par d'autres pays.

Surgénérateurs[modifier]

À long terme, il existerait un moyen de prolonger l'exploitation du nucléaire, en consommant 50 à 100 fois moins d'uranium pour produire les mêmes quantités d'énergie : la surgénération (réacteurs à neutrons rapides, fast breeders). Ce sujet est, une fois encore, source de nombreuses controverses.

Un surgénérateur est un réacteur nucléaire qui crée plus de noyaux fissiles (noyaux pouvant être scindé en noyaux plus petits selon le principe de la fission nucléaire) qu'il n'en consomme. Cela est possible en transmutant des noyaux fertiles (des noyaux non-fissiles, tels que l'uranium appauvri ou le thorium, et disponibles en grandes quantités) en noyaux fissiles (plutonium par exemple). Le réacteur ne crée évidemment pas de la matière à partir de rien, disons simplement qu'il suffit de lui fournir des éléments plutôt communs qu'il transmutera en combustible et brûlera. Économiquement cela semble attirant mais, en pratique, de nombreuses difficultés techniques font que ce type de réacteur n'est intéressant qu'à partir d'un certain prix de l'uranium. Évidemment, cette technologie prendra plus de valeur à l'avenir. Qui plus est, elle permettrait la transmutation de déchets hautement actifs en combustibles.

Mais ces surgénérateurs ont un défaut rédhibitoire : le risque d'emballement. Tchernobyl n'était pas un surgénérateur mais, comme lui, ces réacteurs présentent des rétro-actions positives qui poussent le réacteur à s'emballer. Il faut des contrôles actifs (qui peuvent échouer) pour maintenir le cœur à son niveau de réaction et prévenir l'emballement. D'autant qu'un surgénérateur est exploité en-dessous de son régime maximal. Même s'il est vrai que le réacteur de Tchernobyl présentait d'autres problèmes de conception et de gestion et que les surgénérateurs modernes s'emballeraient moins vite, c'est un risque bien supérieur à celui des réacteurs conventionnels.[21]

Enfin, ces surgénérateurs ont connu des destins malheureux dans le passé, souvent arrêtés prématurément. L'exemple le plus célèbre est français, avec Superphénix. Souvent raillé, ce réacteur n'a été exploité que 53 mois en onze années. Mais les problèmes techniques initiaux, dû à des erreurs de conceptions et une grande complexité technique, n'ont causé que 25 mois d'arrêt. Ce sont avant tout les fermetures administratives (suite à des actions en justice, des interventions parlementaires, la nécessité d'examens, etc) qui ont représenté 54 mois de fermeture. La dernière année, ce réacteur afficha même un excellent taux de disponibilité. Des débats subsistent sur les raisons de sa fermeture par Lionel Jospin en 1997 : pour les uns, cela était dû à un manque d'intérêt économique alors que les prix de l'uranium étaient bas. Pour d'autres, il s'agissait d'une concession faîte au parti des Verts, alors membre important de la "gauche plurielle". Notons un regain d'intérêt récent pour la surgénération : en Inde, du fait de la présence importante de thorium, et aux Etats-Unis avec le projet Generation-IV pour la prochaine génération de centrales.

Perspectives futures[modifier]

La fusion nucléaire est parfois présentée comme le Saint-Graal de l'énergie nucléaire civile : a priori économique (rendement dix fois plus grand que pour la fission), utilisant un combustible disponible à profusion (un milliard d'années de réserve), avec des risques plus faibles de contamination radioactive (combustibles et produits non-radioactifs) et a priori de meilleures conditions de sécurité (contesté par des scientifiques reconnus tels que Pierre-Gilles de Gennes[22] ou le japonais Koshiba), avec une absence totale de risque d'emballement (dans le cadre des recherches menées, l'un des problèmes est en fait d'empêcher la réaction de s'arrêter d'elle-même).

Mais les recherches ont débuté depuis plus de quarante ans. On estimait alors le temps nécessaires à quatre décennies et, aujourd'hui, on en donne toujours la même estimation. Qui plus est, les coûts de recherche sont estimés en milliards d'euros et ne cessent d'augmenter.[23] Le défi est en effet important puisqu'il faut projeter les noyaux atomiques l'un contre l'autre à des vitesses extraordinaires (des centaines de millions de degrés) en luttant contre leur répulsion naturelle, le plasma étant comprimé au moyen de champs magnétiques très intenses et de lasers. Des progrès ont toutefois été accomplis durant cette période puisqu'on parvient désormais à maintenir la réaction pendant plus d'une minute tout en produisant plus d'énergie que l'on en consomme.

La fusion nucléaire est l'objet de plusieurs expériences colossales, telles que le projet international ITER (à Cadarache) ou le laser français Mégajoule, ainsi qu'aux États-Unis ou au Japon.

Voir aussi[modifier]

Liens internes[modifier]

Liens externes[modifier]

Références[modifier]

  1. Le nucléaire : une solution d'avenir ? - notre-planete.info
  2. Viepublique.fr - Le coût de l'électricité en France.
  3. Sortir du nucléaire - Le flop économique
  4. CEA - L'économie du nucléaire
  5. Romandie News - EDF envisage d'affecter 50% de RTE au démantèlement des centrales.
  6. Manicore - Chauffage électrique
  7. World Nuclear - Safety of Nuclear Reactors
  8. World Nuclear - Positive Void Coefficient
  9. Nuclearfaq.ca
  10. Communiqué d'Areva sur la sûreté de l'usine de la Hague face au risque de chute d'avion.
  11. Statistiques sur l'uranium consommés par les centrales nucléaires
  12. Wikipedia - Liste des pays par émissions de dioxyde de carbone par habitant
  13. Compte-rendu de la réunion du CLIC Narbonne-Malvesi
  14. Rapport final de WISE Paris pour le panel STOA - Effets toxiques éventuels engendrés par les usines de retraitement nucléaire à Sellafield et au cap de la Hague.
  15. Autorité de Sûreté Nucléaire - Renforcement de la prévention de la légionellose autour des centrales nucléaires.
  16. Communiqué du Réseau Sortir du nucléaire - Le nucléaire, une énergie propre ?
  17. Article de la Crirad sur les conditions d'exploitation des mines d'uranium par les filliales d'AREVA et les normes ISO
  18. Page de la collaboration 2010 Greenpeace/Criirad sur l'exploitation de l'uranium au Niger
  19. Bilan des analyses 2004-2005 sur l'impact de l'exploitation de l'uranium sur les filliales d'Areva-Cogema au Niger
  20. SFEN
  21. Article de The Nuclear Bulletin - The safety inadequacies of India's fast breeder reactor
  22. Recherche : le cri d'alarme d'un prix Nobel - Les Echos - Jeudi 12 janvier 2006
  23. Le coût d'ITER pourrait flamber - La Recherche n°422 - septembre 2008

Bibliographie[modifier]

  • L'eau et le champagne menacés par les déchets radioactifs, article de Michel Marie, "L'Ecologiste" n°19, juin-juillet-août 2006, p. 28-29
  • Film « Déchets, le cauchemar du nucléaire » de Eric Guéret et Laure Noualhat.


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